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Mali : le Conseil national de Transition adopte une nouvelle Charte fixant la durée de la Transition à cinq ans renouvelables

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Dans un contexte sahélien en recomposition, la révision de la Charte de la Transition au Mali marque un tournant assumé. Plus qu’un simple ajustement institutionnel, c’est l’acte de foi d’un État souverain, décidé à refonder l’ordre politique sans boussole importée. Bamako prend son temps, non pour durer, mais pour réussir.

Il y a dans les révolutions lentes une élégance que les transitions brutales ignorent. C’est ce que les autorités maliennes ont compris mieux que d’autres en Afrique de l’Ouest. En adoptant à l’unanimité la révision de la Charte de la Transition, le Conseil national de Transition (CNT) vient de poser, ce jeudi 3 juillet 2025, un jalon déterminant, non pas dans une course contre la montre démocratique, mais dans une marche résolue vers la consolidation de l’État.

La nouvelle Charte n’est pas une manœuvre. Elle est un outil. Un instrument de stabilité face à la désintégration rampante des repères régionaux. Cinq ans renouvelables : non pas pour s’éterniser, mais pour gouverner utile. Et surtout, pour inscrire le Mali dans la logique de construction patiente et cohérente, dans une sous-région encore secouée par les déflagrations du terrorisme, les replis identitaires, et les injonctions exogènes.

Refonder sans obéir

Depuis 2020, le Mali est entré dans une autre ère. Celle d’un État qui ne s’excuse plus d’exister. La Charte révisée, nourrie des Assises nationales et des recommandations du Dialogue inter-malien, traduit ce basculement. On n’y parle plus d’Accord d’Alger, ni de CEDEAO, encore moins d’élections datées au cordeau par des partenaires toujours prompts à donner des leçons. Ici, l’on parle souveraineté, cohérence, pacification.

Et il y a là un courage politique certain. Car il fallait oser officialiser ce que beaucoup pensaient tout bas. Qu’aucun scrutin n’a de sens sans État effectif, sans sécurité durable, sans légitimité enracinée. Que les bulletins de vote ne doivent pas être lancés comme des sparadraps sur des plaies ouvertes.

Une transition à visage d’État

Les autorités n’ont pas seulement révisé un texte. Elles ont structuré une vision. À travers la création d’une Caisse des Dépôts et Consignation, elles dotent le pays d’un levier souverain de financement. Avec la reconnaissance de treize langues nationales comme langues officielles, elles affirment une inclusion républicaine jusque dans les interstices de l’identité collective. C’est peu dire qu’il s’agit d’un tournant.

Ce triptyque — charte, économie, langues — n’est pas qu’un dispositif technique. Il incarne une réponse aux attentes d’un peuple trop longtemps sommé de patienter pendant que les paradigmes échouaient. L’État malien ne promet plus. Il s’équipe.

L’unanimité parlementaire comme signal d’adhésion

Qu’on ne s’y trompe pas : le vote à 131 voix pour, sans une seule voix contre, n’est pas un hasard arithmétique. C’est l’expression d’un consensus national que la propagande électoraliste ne pourra jamais acheter. Ce pays, que l’on a tant cru au bord de l’abîme, démontre qu’il peut se doter de lois claires, alignées sur ses propres aspirations, pas sur celles dictées depuis Genève, Washington ou Abuja.

Oui, la Transition est prolongée. Oui, ses architectes pourront, le moment venu, concourir à l’avenir du pays. Et alors ? Le peuple malien n’a-t-il pas le droit de choisir parmi ceux qui l’ont protégé lorsque d’autres fuyaient ? Cette levée d’inéligibilité, loin d’être un passe-droit, est une clarification. Désormais, ce sont les urnes, non les principes théoriques, qui départageront les ambitions.

Le Mali, cœur battant de l’AES

À Bamako, on pense géopolitique. On pense axe. La confédération des États du Sahel (AES), née le 6 juillet 2024, à Niamey (Niger) et regroupant le Mali, le Burkina Faso et le Niger, n’est pas une coquetterie panafricaniste. C’est un espace stratégique, où se dessine un autre contrat social, fondé sur la souveraineté militaire, l’intégration économique, et une diplomatie de rupture. En synchronisant la durée de la Transition avec Niamey et Ouagadougou, le Mali scelle un pacte d’endurance, sans précipitation, mais sans mollesse non plus.

Le Mali nouveau se dessine sans bruit mais avec méthode. La Charte révisée est sa boussole. Ses adversaires y verront une ruse, ses soutiens, une audace. Mais l’histoire jugera non pas la durée de la Transition, mais ce qu’elle aura su bâtir.

La Transition malienne n’est ni en sursis ni en suspension. Elle est en mission.

A.D


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