La pénurie de carburant que vit le Mali depuis septembre 2025 a affecté tous les secteurs de la vie. Certes, les autorités sont au four et au moulin pour assurer l’approvisionnement rapide du pays. Cependant, elles devraient faire de cette crise une opportunité pour se tourner vers d’autres sources d’énergie dont dispose le pays, telles que l’hydrogène naturel.
Le Mali dispose d’énormes potentialités naturelles. Si, ce sont les ressources minières qui sont les plus connues, car les mieux exploitées, il y a l’hydrogène naturel. Cette source d’énergie peut constituer une sérieuse alternative à l’essence, au gaz-oil, etc. Elle avait déjà fait l’objet d’une expérimentation, même si c’était à un niveau moindre. Ce qui est un atout pour relancer son exploitation à grande échelle.
L’hydrogène malien découvert de façon inédite
Le Mali est une référence emblématique d’accumulations naturelles d’hydrogène. Son potentiel a été révélé de façon naturelle. C’était en 1987 à Bourakébougou (à environ 60 kilomètres au nord-ouest de Bamako, la capitale du Mali). C’est à travers un fait inédit : creusement d’un puits pour approvisionner en eau le village. Lorsque l’excavation dépasse cent mètres de profondeur, ce qui ressemble à un courant d’air remonte du puits.
Pendant sa pause, un ouvrier, en tentant d’allumer sa cigarette, provoque une explosion soudaine. Dans la stupeur, le puits est fermé, cimenté et condamné. Vingt ans s’écoulent. En 2007, des scientifiques étrangers sur initiative de l’homme d’affaires malien, Alou Boubacar Diallo, viennent sur les lieux pour analyser le fameux courant d’air. Le résultat est sans appel : le courant d’air est composé à 98 % d’hydrogène et 2 % de méthane et de diazote.
Une première expérimentation réussie
Dès 2012, de l’équipement est installé pour convertir cet hydrogène en électricité, ce qui a permis d’alimenter le village en électricité. Via un puits, l’équipement convertit la petite molécule en électricité, d’abord grâce à un générateur en combustion directe de 30 kW, puis, depuis 2022, grâce à l’installation d’une pile à combustible de 5 kW. Ce qui permet l’éclairage public du village et quelques appareils électroniques. Ce qui a fait du Mali, le seul pays au monde où un gisement d’hydrogène naturel est exploité.
5,4 millions de tonnes exploitables
Cette exploitation à Bourakébougou a suscité la curiosité de la communauté scientifique internationale qui a, depuis fait un certain nombre d’études sur les lieux et découvert d’autres réserves d’hydrogène naturel dans les sous-sols d’autant plus importantes. En plus de ses réserves colossales d’hydrogène naturel, la région possèderait, selon l’équipe de chercheurs de l’Institut de Physique du Globe de Paris (citée dans la revue spécialisée « International Journal of Hydrogen Energy ») « les caractéristiques géologiques et géochimiques uniques d’un système d’hydrogène actif », soit une source de production continue, qui permettrait d’exploiter un flux inépuisable. Ce qui a fait dire aux scientifiques que la ressource exploitable estimée serait de 5,4 millions de tonnes, soit 5 % environ de la production mondiale d’hydrogène, toutes sources confondues.
L’hydrogène naturel, un enjeu mondial
Plus de 95 % de l’hydrogène produit dans le monde est issu du méthane, du pétrole ou du charbon. C’est un hydrogène industriel. Alors que l’hydrogène naturel appelé hydrogène blanc, est un gaz invisible, inflammable et décarboné exploité sans une transformation industrielle lourde. Il est issu du sous-sol et n’émet quasiment pas de CO₂, car il ne nécessite ni combustion ni électrolyse pour être généré. On ne le trouve que très rarement sous sa forme pure (H2). Et, c’est ce type d’hydrogène qui se trouve au Mali. Potentiellement, l’hydrogène naturel pourrait alimenter des entreprises ou encore toutes sortes de transports (voitures, trains, bateaux, avions).
Au regard de sa nature, on peut affirmer que l’hydrogène naturel est une ressource propre dans un contexte mondial de lutte contre le changement climatique. Celui, qui le maîtrise, pourrait bien s’imposer comme un acteur central de la transition énergétique mondiale. Donc, le Mali devra largement profiter de son potentiel pour assurer son indépendance partielle ou totale en termes d’énergies.
Sidi Modibo Coulibaly
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