À Addis-Abeba, plus de quarante chefs d’État africains ont ouvert, le 8 septembre, le deuxième Sommet africain sur le climat. Un rendez-vous placé sous le signe de l’urgence : le continent, responsable de seulement 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, est déjà en première ligne des catastrophes climatiques. Entre indignation, hypocrisie et appels à l’unité, l’Afrique cherche à transformer sa vulnérabilité en levier de puissance face au reste du monde.
Ils étaient là, alignés comme à la parade : Ismaïl Omar Guelleh, le vieux lion de Djibouti, Abiy Ahmed, le jeune prix Nobel de la paix reconverti en chef de guerre, William Ruto, l’hyper-président kényan à l’énergie inépuisable. Plus de quarante dirigeants, tous rassemblés à Addis-Abeba pour parler climat, cette plaie béante dont l’Afrique n’est pas responsable mais dont elle paie la facture. Quatre petits pourcents d’émissions mondiales de gaz à effet de serre – mais chaque année 2 à 5 % du PIB qui s’évapore dans les sécheresses et les inondations. Le compte est vite fait : nous saignons pour les excès des autres.
Des financements extérieurs pour une souveraineté énergétique
Alors oui, Abiy Ahmed claque la formule du jour : « Nous ne sommes pas là pour négocier notre survie. » Mais qui le croit encore ? Les besoins sont d’un trillion de dollars, les promesses plafonnent à 300 milliards. À l’aumône des grandes puissances, les chefs d’État africains opposent de belles indignations. Mais dans combien de capitales – Dakar, Kinshasa, Luanda – signe-t-on encore, avec le sourire, des contrats léonins bradant lithium, cobalt, manganèse, gisements critiques pour l’économie verte ? On dénonce les bulldozers occidentaux, mais on ferme les yeux sur les nôtres, qui éventrent forêts et tourbières.
Ce sommet, le deuxième du genre, deux mois avant la COP30 en Amazonie, est une énième tentative d’afficher une unité africaine qui n’existe que sur le papier. L’Afrique veut parler d’une seule voix, mais ses dirigeants passent plus de temps à rivaliser de courbettes devant Pékin, Dubaï ou Bruxelles qu’à investir eux-mêmes dans leurs barrages solaires ou dans l’éolien. Le paradoxe est là, brutal : nous exigeons des financements extérieurs pour une souveraineté énergétique que nous refusons d’assumer.
Pour que la belle indignation ne reste pas lettre morte
L’Afrique a pourtant des atouts colossaux : une jeunesse qui fourmille d’ingéniosité, 300 jours de soleil par an, des terres arables à perte de vue. Si nous ne transformons pas cela en économie climatique, alors Addis ne sera qu’un sommet de plus, une tribune où l’on crie sa colère avant de reprendre, docile, le chemin des impuissances. L’Afrique doit cesser de mendier et apprendre à imposer. Sinon, la belle indignation restera lettre morte, emportée par le vent chaud de la Corne de l’Afrique et oubliée sitôt les portes du Centre de conférences refermées.
Chiencoro Diarra
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