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Les élections sénégalaises, entre enjeux cruciaux et défis logistiques

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À quelques jours des élections législatives au Sénégal, la non-retrait de plus de 264 000 cartes d’électeurs met en lumière des défis logistiques et un désintérêt inquiétant qui pourraient peser sur la légitimité du scrutin. Explication. 

Le 17 novembre 2024, les Sénégalais se rendront aux urnes pour élire une nouvelle Assemblée nationale, suite à la dissolution du Parlement décidée par le président Bassirou Diomaye Faye le 12 septembre dernier. Cette manœuvre politique, qui a entraîné l’élimination d’un Parlement encore aux mains de l’ancien régime, marque un tournant dans l’histoire récente du pays. Mais à moins de deux semaines de ce scrutin décisif, un problème persistant met à nu les faiblesses du système électoral sénégalais : plus de 264 000 cartes d’électeurs restent non retirées dans les bureaux de vote.

Une inertie électorale préoccupante

L’absence de retrait de ces cartes interpelle. Sur un fichier électoral comptant environ 7,4 millions d’électeurs, un tel chiffre est loin d’être négligeable. Que signifie cette inertie ? Un manque de confiance envers les institutions électorales ? Une désillusion générale vis-à-vis de la politique ? Ou est-ce simplement le résultat d’une organisation déficiente et de barrières administratives ? Il est clair que cette situation met en lumière des défaillances qui, si elles ne sont pas résolues rapidement, pourraient impacter la participation et la légitimité même de ce scrutin.

Dans un pays où la vitalité démocratique a longtemps été une fierté, le fait que des centaines de milliers de citoyens n’aient pas récupéré leur carte d’électeur à quelques jours de l’échéance devrait sonner l’alarme. Une démocratie, pour s’épanouir, doit être soutenue par des citoyens actifs et engagés, non par une masse qui, pour diverses raisons, reste à la marge du processus.

Les raisons d’un désintérêt inquiétant

Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette situation. D’une part, la dissolution du Parlement et l’annonce soudaine de nouvelles élections ont pu générer une certaine confusion et un sentiment d’instabilité politique. Quand les décisions majeures se prennent sans une préparation adéquate et une communication efficace, le peuple, désorienté, peut décider de s’abstenir.

D’autre part, le sentiment de désillusion envers la classe politique persiste. Ces dernières années, marquées par des scandales, des promesses non tenues et des rivalités internes, ont contribué à une lassitude électorale. Bassirou Diomaye Faye, en dissolvant l’Assemblée dominée par l’ancien camp au pouvoir, a voulu rompre avec ce passé et afficher une posture de renouveau. Cependant, la rapidité avec laquelle ce processus a été engagé a-t-elle laissé assez de temps aux citoyens pour se préparer et comprendre les enjeux ?

Le défi logistique et ses implications

Il ne faut pas non plus négliger les défis logistiques. Au Sénégal, le retrait des cartes d’électeurs peut être un parcours semé d’embûches. Files d’attente interminables, bureaucratie inefficace et manque de sensibilisation sont autant de barrières qui découragent les citoyens les plus motivés. Un électeur qui doit choisir entre une journée de travail et la récupération d’un document essentiel à son vote peut très bien décider que l’effort n’en vaut pas la peine. Et ce, surtout si l’image de l’élection elle-même est entachée de soupçons de partialité ou de manipulation.

Ce scrutin de novembre est bien plus qu’une simple élection législative. Il est un test pour le président Bassirou Diomaye Faye, qui doit prouver que sa décision de dissoudre l’Assemblée était plus qu’une simple manœuvre politique pour asseoir son pouvoir. Il doit montrer que la démocratie sénégalaise reste vivante, inclusive et respectueuse des règles du jeu. Mais comment assurer une élection crédible lorsque tant de citoyens pourraient être exclus, de facto, faute d’avoir pu récupérer leur carte ?

Un test pour la légitimité démocratique

La balle est dans le camp des autorités électorales et du gouvernement. Une mobilisation de dernière minute, des campagnes de sensibilisation plus vigoureuses et des facilités pour le retrait des cartes pourraient inverser la tendance. Sans cela, l’élection risque de se tenir dans une atmosphère d’indifférence généralisée, marquée par une abstention record qui affaiblirait non seulement le mandat des futurs élus, mais aussi la légitimité de l’ensemble du système politique.

Il est temps que le Sénégal prouve, une fois de plus, qu’il est à la hauteur de sa réputation de phare démocratique en Afrique de l’Ouest. Les citoyens doivent être encouragés à participer, et le système électoral doit se montrer à la hauteur de la tâche. Faute de quoi, l’élection du 17 novembre pourrait passer de l’espoir d’un renouveau politique à un rendez-vous manqué avec l’histoire.

Alassane Diarra 


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