Accueil » Blog » A la Une » Yaya Cissé transféré au Mali après 12 ans de détention en Mauritanie

Yaya Cissé : retour au pays d’un condamné oublié, otage d’une erreur judiciaire ?

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Condamné à mort en Mauritanie en 2013 pour un crime qu’il nie avoir commis, Yaya Cissé, ressortissant malien, a passé douze années dans les couloirs de l’injustice. Entre procédures viciées, aveux contestés et procès inéquitable, son affaire incarne l’archétype de l’erreur judiciaire. Aujourd’hui, son transfert vers le Mali relance les espoirs d’un nouveau procès et ravive les questions sur l’indépendance de la justice dans la sous-région.

Son nom était presque tombé dans l’oubli, dissous dans les limbes d’un système judiciaire étranger. Yaya Cissé, ressortissant malien, a été condamné à mort en 2013 en Mauritanie pour un crime qu’il a toujours nié avoir commis. Douze années plus tard, ce détenu devient le symbole d’un combat pour la justice, après avoir été transféré au Mali le 17 avril 2025 pour purger sa peine. Une avancée permise par la coopération judiciaire entre Nouakchott et Bamako, mais aussi par une mobilisation silencieuse et obstinée de défenseurs des droits humains.

Une condamnation entachée d’irrégularités

L’affaire remonte au 26 juillet 2010. Un homme est assassiné à Nouadhibou. Très vite, Yaya Cissé est arrêté. Pas de mandat. Pas d’enquête approfondie. Il est détenu, puis jugé en 2012, dans une langue qu’il ne comprend pas – l’arabe – sans qu’un interprète assermenté ne soit désigné. Une procédure grossière, selon ses avocats, entachée d’irrégularités flagrantes.

Le témoignage clé de l’accusation, celui d’une compatriote, Yaye Coulibaly, sera finalement rétracté. Elle affirme avoir été contrainte de mentir, indiquant initialement que Cissé se trouvait à Nouadhibou le soir du crime. Or, des preuves tangibles – cachets d’immigration, listings de compagnies de transport, relevés téléphoniques – démontrent qu’il se trouvait alors sur la route de Bamako, via Dakar.

Une justice à deux vitesses

Malgré ces éléments à décharge, Yaya Cissé est condamné à mort. Ses coaccusés, eux, écopent de peines nettement plus légères – entre deux et cinq ans de prison. Dans les couloirs sombres d’une justice à deux vitesses, le cas Cissé fait tache. D’autant plus que son dossier mentionne l’usage possible de la torture pour obtenir des aveux. Un procédé interdit par toutes les conventions internationales, mais encore trop répandu.

Pendant ce temps, les appels à la révision du procès se multiplient. Les ONG s’en mêlent. Les réseaux de la diaspora malienne s’activent, mobilisant avocats, diplomates et journalistes. L’histoire de Yaya Cissé devient celle d’un homme pris au piège d’un engrenage judiciaire où la présomption d’innocence n’est plus qu’une abstraction.

Le transfert au Mali, un soulagement national

Le 17 avril 2025, le ministère malien de la Justice officialise la nouvelle. Yaya Cissé est transféré au Mali. Une décision rendue possible par une convention de coopération judiciaire signée entre les deux pays. Dans un communiqué, le 17 avril 2025, le ministre de la Justice et des Droits de l’Homme, Garde des Sceaux, Mamoudou Kassogué, salue l’implication personnelle du Président de la Transition, le Général d’armée Assimi Goïta, pour avoir permis cet aboutissement.

Le ministre n’oublie pas non plus de remercier les autorités mauritaniennes pour leur collaboration, ainsi que les associations de défense des droits humains et la diaspora malienne mobilisée depuis plus d’une décennie.

Le transfert ne signifie pas la fin du calvaire. Yaya Cissé reste condamné. Mais l’espoir renaît. Au Mali, ses soutiens espèrent une révision du procès, voire une libération conditionnelle. Une pétition circule. Des parlementaires se saisissent du dossier. L’État malien, désormais dépositaire de sa peine, pourrait initier une procédure de grâce ou une réévaluation judiciaire.

A.D

  

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