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Mali : drones, terrorisme et souveraineté – l’avertissement d’un État qui ne veut plus plier

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À la suite de la destruction d’un drone malien dans le nord du pays, le Mali engage une procédure judiciaire d’envergure. Derrière les termes juridiques, c’est une nouvelle étape dans l’affirmation de la souveraineté d’un État en recomposition, pris entre pressions extérieures, menaces transnationales et volonté de maîtrise de son destin.

Il est des événements dont la portée dépasse l’instant, dont l’impact ne se mesure pas seulement en pertes matérielles, mais en mutations silencieuses de l’ordre du monde. Le communiqué publié signé le 8 avril 2025, par le Procureur de la République du Pôle judiciaire spécialisé de Bamako, et rendu public via les réseaux sociaux le 9 avril,  en est un. Derrière les termes juridiques — « association de malfaiteurs », « financement du terrorisme », « détention illégale d’armes de guerre » — se dessine une volonté claire : celle d’un État qui affirme, envers et contre tous, son droit à exister selon ses propres lois.

La fin du silence, la fin de la passivité stratégique

Dans les faits, il s’agit de l’ouverture d’une information judiciaire à la suite de la destruction d’un drone militaire malien dans la région de Kidal, dans la nuit du 31 mars au 1er avril. Un acte que les autorités n’ont pas seulement interprété comme une atteinte matérielle, mais aussi comme un signal grave, un symptôme d’un désordre plus profond, où se mêlent réseaux transnationaux, complicités internes et implications régionales.

Ce drone, immatriculé TZ_98D, n’est pas une simple machine. Il symbolise l’entrée du Mali dans une modernité sécuritaire que certains acteurs — étatiques ou non — cherchent à affaiblir. En annonçant une enquête visant des faits de terrorisme et de complicité, le parquet malien ne se limite pas à la riposte judiciaire. Il annonce, en filigrane, un changement de posture : la fin du silence, la fin de la passivité stratégique.

Le contexte, lui, est lourd. Depuis la reconfiguration du Sahel autour de l’Alliance des États du Sahel (AES), en septembre 2023, les lignes bougent. De nouvelles alliances se nouent. De vieilles suspicions resurgissent. Le Mali, au cœur de cet échiquier mouvant, semble désormais décidé à mettre en œuvre tous les leviers du droit pour affirmer sa souveraineté, y compris celui, rarement activé jusqu’ici, de la justice transnationale.

Mais il faut voir plus loin

Derrière cette affaire se jouent plusieurs batailles. Celle de la souveraineté, évidemment ; celle du contrôle de l’espace aérien sahélien, enjeu militaire et symbolique ; et surtout, celle du récit. Car dans un monde où l’information est une arme, nommer ses ennemis, désigner les faits, ouvrir une enquête, c’est déjà reprendre le contrôle de l’histoire.

Il ne faut pas s’y tromper, ce communiqué n’est pas seulement une formalité judiciaire. C’est un acte politique. Un avertissement. Un jalon dans la refondation d’un État qui veut désormais que chaque coup porté contre lui ait une réponse, à la fois institutionnelle, diplomatique, et peut-être demain, technologique.

La suite dépendra de plusieurs choses : des résultats de l’enquête, de la coopération des populations, mais aussi du comportement de ceux que le Mali soupçonne, sans les nommer encore, d’avoir trempé dans cette opération. Dans cette guerre feutrée pour la maîtrise du ciel et du sol sahélien, chaque drone abattu, chaque procédure engagée, est un chapitre de l’avenir qui s’écrit — dans le droit, dans le sang, ou dans la diplomatie.

A.D


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