Présente pour la deuxième année consécutive au Salon du Livre africain de Paris, les éditions La Sahélienne confirme son statut de maison d’édition incontournable au Mali, voire en Afrique de l’Ouest. Portée par Ismaila Samba Traoré, écrivain de grande renommée internationale, elle dévoile un catalogue riche, allant de la littérature jeunesse aux essais engagés, en passant par les Presses universitaires du Sahel. Entre reconnaissance internationale et défis locaux, l’éditeur malien trace sa route, malgré la piraterie et le manque de soutien institutionnel.
À bientôt 80 ans, Ismaila Samba Traoré n’a rien perdu de sa verve. Il parle du livre comme d’autres parlent de politique, avec la conviction du combattant et l’obsession du bâtisseur. Depuis 1992, La Sahélienne, sa maison d’édition, trace sa route, défiant les vents contraires, la piraterie éditoriale et l’indifférence institutionnelle. Aujourd’hui, elle s’impose comme un acteur incontournable de l’édition en Afrique de l’Ouest, notamment au Mali. Et Paris, une fois encore, lui déroule son tapis rouge.
Une reconnaissance grandissante
Cette année, au Salon du Livre africain de Paris, du 14 au 16 mars 2025, La Sahélienne ne vient pas en figurante. Elle revient en conquérante. Deux années consécutives de présence, des livres salués par la critique, une reconnaissance grandissante : « Nous avons pris conscience du volume de travail abattu par La Sahélienne de 1992 à ce jour », confie Ismaila Samba. Un catalogue « riche et diversifié » qui surprend même les jeunes managers de la maison, fascinés par l’ampleur de l’œuvre.
Mais pour l’éditeur malien, Paris n’est qu’une étape. Car l’ambition de La Sahélienne dépasse les frontières. Déjà elle se prépare à investir le Maghreb, tandis que des demandes affluent de Chine, de Guyane, du Brésil et d’Afrique centrale. Une reconnaissance qui doit tout au travail acharné d’une équipe resserrée et passionnée.
« Nous construisons au forceps, au jour le jour, avec de très petits moyens. Mais la passion fait le reste », lâche l’auteur des Ruchers de la capitale, lucide sur les défis qui l’attendent. Car si La Sahélienne s’impose, c’est sans le soutien de l’État malien ni des mécènes. « Tout ce beau travail que nous menons se fait sur ressources internes », insiste-t-il. Et dans un environnement où le piratage des livres est un sport national, où les librairies clandestines prospèrent en toute impunité, le combat est permanent.
Une vitrine de la créativité sahélienne
À Paris, La Sahélienne mettra en avant trois axes stratégiques : la littérature jeunesse, un secteur en pleine explosion ; les Presses universitaires du sahel, pour structurer la recherche africaine ; et le catalogue général, vitrine d’une créativité sahélienne sans complexe.
Parmi les ouvrages phares présentés cette année, trois lauréats du Concours littéraire Jeune Écrivain malien 2024 seront sous les projecteurs : la vie en fumée, le refus de la dot, le procès de la vie.
Mais La Sahélienne ne se limite pas à la fiction. Elle porte aussi des œuvres engagées sur des enjeux de société brûlants, comme la paix et la cohésion sociale face au discours de haine, La Maquisarde de Bamako. Autre titre présent, les familles fondatrices de Bamako.
Au-delà des salons, une bataille pour la reconnaissance
« Les salons sont importants pour jauger la créativité d’une maison d’édition », rappelle Ismaila Samba Traoré. Mais au-delà de la performance commerciale, il y a une quête plus intime. Celle d’un homme qui, à l’approche des 80 ans, refuse de baisser les bras. « C’est une passion qui me porte et qui me permet de garder la distance avec les chapelles en tout genre. »
Un pied dans la transmission, un autre dans la résistance. Le livre, pour lui, reste une arme. Et La Sahélienne, plus qu’une maison d’édition, un état d’esprit.
Dans un monde où l’Afrique est encore trop souvent un marché et non un producteur de savoirs, Ismaila Samba Traoré fait figure de franc-tireur. Il avance, imperturbable. Paris l’accueille. Le Maghreb l’attend. Le combat continue.
F.Togola
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