En plus de l’insécurité, la plupart des pays du Sahel sont confrontés à une crise alimentaire. Comme le « tout militaire » n’est plus une solution conseillée, il faut adopter un plan de riposte holistique.
« Le conflit au Sahel prend de l’ampleur, devient plus complexe et implique de plus en plus d’acteurs armés. Les civils finissent par payer le prix le plus lourd, car ils sont confrontés à un nombre croissant d’attaques meurtrières, de violences basées sur le genre, d’extorsions ou d’intimidations, et sont contraints de fuir, souvent à plusieurs reprises », avait déclaré, en 2021, Xavier Creach, coordinateur du HCR pour le Sahel et directeur adjoint pour l’Afrique occidentale et centrale.
Ces violences ont entraîné, selon l’ONU, le déracinement d’environ 450 000 personnes dans leur pays et forcé 36 000 autres à fuir dans un pays voisin.
Burkina Faso, Niger, Mali
Au Burkina Faso, le nombre total de déplacés internes est passé à plus de 1,5 million à la fin de 2021. Au Niger, le nombre de personnes déplacées dans les régions de Tillabéri et Tahoua a augmenté de 53 % au cours des 12 derniers mois. Au Mali, plus de 400 000 personnes sont déplacées à l’intérieur du pays.
Le terrorisme n’est donc plus la seule menace contre ces populations. Elles sont également victimes d’une insécurité alimentaire qui s’explique d’une part par l’insécurité croissante, et d’autre part par le manque de précipitations et les conséquences du Covid-19.
Selon la directrice des opérations de Médecins sans frontières (MSF), Isabelle Defourny, au Niger, « Cette année, la première projection de l’Unicef avance le nombre de 492 000 enfants de moins de 5 ans atteints de malnutrition aiguë sévère et 1,3 million d’enfants malnutris aigus [sur un total de 4,7 millions d’enfants de moins de 5 ans] ». Cette donne reste de même pour le Burkina Faso. « Plus de 760 000 habitants souffrent de malnutrition aiguë. Dans l’est, la région de Fada N’Gourma, où vivent 70 000 déplacés, est plongée dans une crise alimentaire sans précédent », peut-on lire dans un reportage du journal Le Monde.
Au Mali, le statu quo ne change pas non plus. Selon Ocha Mali, près de 2 millions de personnes (22 % de la population) pourrait se trouver dans une situation d’insécurité alimentaire aiguë pendant la période de soudure de juin — août 2022. « Cette crise alimentaire résultant de l’insécurité, des conflits intercommunautaires, de la perturbation des activités socio-économiques et de l’insuffisance pluviométrique avec une dégradation des moyens d’existence », précise l’organisation dans son Plan de réponse humanitaire janvier à décembre 2022.
Dans la plupart de ces pays, cette insécurité alimentaire a occasionné une augmentation du prix des denrées alimentaires.
Mettre en place un plan holistique
Les États de cette région ont développé certaines initiatives en vue de contenir cette crise alimentaire. Ils ont, pour la plupart, suspendu l’exportation de certaines denrées alimentaires. Au Mali, en décembre 2021 et au Burkina Faso en février 2022.
Cette insécurité alimentaire est un phénomène qui handicape l’effort de ces États contre le terrorisme. Elle rend plus difficile le chemin devant conduire à la stabilité et, par ricochet, au développement socio-économique. Pourtant, chaque année, les organisations humanitaires déplorent l’insuffisance des réponses apportées pour satisfaire leur Plan de riposte humanitaire. Dans un tel contexte, ces États doivent comprendre que la meilleure réponse demeure la mise en place d’un plan de riposte holistique prenant en compte à la fois toutes ces crises et des efforts pour le mettre en œuvre. Comme signalé déjà par maints spécialistes des questions sécuritaires, le « tout militaire » n’est plus une solution conseillée. Il faut une combinaison de réponses militaire et humanitaire.
Chiencoro Diarra
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