Les terroristes frappent généralement de façon quasi simultanée les « États faillis » du Sahel. De telles attaques, majoritairement contre des civils, appellent des réponses coordonnées entre les pays de cette région.
Au Mali, au Niger et au Burkina Faso, on assiste ces dernières années, à la montée d’un cran de l’insécurité liée aux attaques quasi simultanées d’hommes armés. Dans ces pays frontaliers, les groupes terroristes donnent l’impression de fonctionner selon un plan de campagne de déstabilisation, généralement lancé en même temps dans chacun de ces pays où des attaques sont perpétrées de façon successive avec des bilans très souvent assez lourds.
Au Mali, depuis l’attaque de Mondoro, le 4 mars 2022, ayant coûté la vie à 27 soldats et 70 terroristes, selon les chiffres officiels de l’État-major malien, la menace terroriste ne s’estompe plus. Au cours de la semaine dernière, une centaine de personnes ont été tuées au nord du Mali, selon certains médias. « Un élu de la région de Ménaka s’exprimant sous le couvert de l’anonymat a parlé de son côté de “plus d’une centaine de civils et de combattants tués mardi, mercredi et jeudi”, à Tamalat et Insinane, deux localités maliennes situées dans la région de Ménaka, frontalière du Niger», a indiqué France 24, le 11 mars dernier.
Cette montée d’un cran de la crise sécuritaire, après une période d’accalmie, qui faisait croire à une amélioration de la situation sécuritaire et « une montée en puissance » de l’armée malienne, fait couler beaucoup de salives. Les interrogations se font nombreuses. Mais l’envers de la médaille, c’est le en-même-temps des groupes terroristes évoluant dans ces pays. Au même moment que le Mali est frappé par l’État islamique au Grand Sahara (EIGS), affilié au groupe État islamique, le Niger aussi bien que le Burkina Faso se trouvent également frappés de plein cœur.
Jouer sur la sensibilité des populations ?
Dans le pays des hommes intègres, au moins quatorze civils ont été tués, jeudi 10 mars 2022, dans une attaque d’individus armés non identifiés sur un site aurifère dans la commune de Seytenga, à la frontière nigérienne. « […] Les assaillants ont fait irruption sur le site minier artisanal et se sont mis à tirer sur les orpailleurs. Les assaillants ont aussi intimé l’ordre aux orpailleurs de quitter le site dans un délai de 72 heures », rapporte l’Agence Anadolu.
« Dans l’après-midi du dimanche 20 février 2022, un camion de transport ayant quitté (le village de) Taroun à destination de Tizigorou, village situé dans le département de Banibangou, région de Tillabéri, a fait l’objet d’une attaque meurtrière perpétrée par des bandits armés à bord de plusieurs motos, non encore identifiés », indique un communiqué du ministère nigérien de l’Intérieur lu à la télévision nationale. Une attaque qui a fait au moins 18 morts civils.
Dans chacun de ces pays victimes de cette épidémie terroriste, un fait semble sauter aux yeux : les attaques contre les civils, ces couches vulnérables. On semble jouer sur la sensibilité de ces populations. Pour quel motif ? On ne saurait le dire. Ce qui paraît plus certain, c’est que nous assistons à une forme de fusion des groupes terroristes évoluant dans ces régions. Face à une telle situation, ces États, s’ils souhaitent s’en sortir en accomplissant leur devoir de protection des civils, doivent se donner la main.
Aboutissement de stabilité institutionnelle
Lors d’une Réunion de haut niveau à l’Assemblée générale des Nations Unies, le 24 septembre 2020, l’ex-président nigérien, Mahamadou Issoufou, avait indiqué : « Seule une action internationale pourra rétablir la sécurité dans les régions africaines du Sahel et du bassin du lac Tchad ». Seulement, encore en 2022, on se demanderait pourquoi les initiatives allant dans ce sens sont couronnées plus ou moins d’échecs. Le Mali ne veut plus de l’opération militaire française Barkhane sur son territoire parce qu’il l’estime incapable à juguler la menace terroriste, depuis 2013. Les missions européennes sont dans le même logis.
La coalition formée par les cinq pays du Mali, du Niger, du Tchad, du Burkina Faso et de la Mauritanie (le G5 Sahel) peine à être également pleinement opérationnelle. Les changements « anticonstitutionnels », de plus en plus récurrents dans cette région, rendent la situation encore plus difficile. À ces problèmes s’ajoute le manque de confiance, d’abord entre les dirigeants de ces États qui ne cessent de se couvrir d’invectives, et ensuite entre eux et leurs populations.
Pour gagner cette bataille contre les groupes armés terroristes, qui coupent le sommeil aux civils, les États du Sahel doivent accepter de souffler dans la même trompette en engageant une lutte commune contre ces GAT. Car tant que cette lutte n’est pas gagnée, inutile d’espérer sur une stabilité institutionnelle.
Chiencoro Diarra
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