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France : le martyre silencieux du Malien Aboubakar Cissé

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Le vendredi 25 avril 2025, un drame a profondément choqué la France et le monde musulman. Aboubakar Cissé, un jeune Malien d’une vingtaine d’années, a été assassiné dans la mosquée Khadidja de La Grand-Combe, dans le Gard. Ce fidèle musulman a été poignardé à plusieurs dizaines de reprises alors qu’il priait seul dans ce lieu de culte. 

Il était un jeune homme sans histoire, croyant discret, l’un de ces visages modestes de la diaspora africaine dont la France ne parle qu’au détour du malheur. Vendredi 25 avril, à La Grand-Combe, petite commune cévenole au passé ouvrier, Aboubakar Cissé, 22 ans, a été assassiné dans une mosquée. Non pas dans une ruelle sombre, ni au détour d’un conflit de quartier, mais dans un lieu de culte, un espace sacré, un sanctuaire. Le jeune Malien, seul, en prière, a été poignardé à une quarantaine de reprises par un homme de son âge, Olivier H., citoyen français d’origine bosnienne.

L’islamophobie, un poison quotidien

Ce que révèle la vidéosurveillance glace le sang. Une mise à mort ritualisée, préméditée, filmée par le meurtrier lui-même, ponctuée d’invectives islamophobes d’un grotesque glaçant — « ton Allah de merde », entend-on dans la vidéo. Trois jours durant, l’auteur de ce crime odieux a pris la fuite avant de se rendre en Italie. L’enquête du parquet d’Alès a très vite confirmé la dimension raciste et religieuse de cet acte. Il s’agit bien d’un meurtre islamophobe, l’un des plus violents de ces dernières années.

Aboubakar Cissé n’était pas un inconnu dans sa communauté. Fils de travailleurs maliens, il aidait bénévolement à la mosquée Khadidja, en attendant de décrocher un emploi après son CAP de menuiserie. « Gentil », « serviable », « pieux », les qualificatifs de ses proches se heurtent à l’absurdité du sort qui lui a été réservé. Ce n’est pas une simple tragédie individuelle, c’est le miroir brisé d’une société où l’islamophobie, souvent insidieuse, parfois instrumentalisée, devient un poison quotidien.

La réaction du pays ? Emue, certes, mais non sans fausses notes. À l’Assemblée nationale, il a fallu des pressions pour que soit accordée une minute de silence — initialement refusée par Yaël Braun-Pivet. L’indignation n’a pas été immédiate, ni unanime. Comme si la vie d’un musulman noir valait un deuil moins solennel. Seuls quelques partis de gauche, dont La France insoumise, ont dénoncé cet « apartheid mémoriel».

Votre France est aussi la nôtre

Le président Macron a fini par condamner fermement l’acte, tandis que François Bayrou, désormais Premier ministre, a nommé les choses : « meurtre islamophobe ». Mais l’essentiel est ailleurs. Dans la douleur d’une famille, dans la peur d’une communauté, et dans le silence embarrassé de ceux qui, d’ordinaire, brandissent la laïcité comme une arme plutôt qu’un bouclier.

À Bamako, la nouvelle a retenti comme un coup de tonnerre. Mossa Ag Attaher, ministre des Maliens de l’extérieur, a exprimé sa colère et sa solidarité. Le drame ravive, une fois encore, les blessures d’une diaspora qui se sent invisible, sinon méprisée, dans un pays où elle vit, travaille et prie.

À La Grand-Combe, ils étaient plus d’un millier à marcher en blanc pour Aboubakar. Pas pour protester — pour exister. Pour dire que leur France est aussi la nôtre.

La rédaction 


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