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[Éditorial] Un an après la reprise de Kidal, le Mali face au défi de la paix et de la souveraineté

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Ce 11 novembre, marque le début d’une semaine symbolique pour le Mali, une semaine de commémoration et de réflexion qui culminera le 14 novembre, date anniversaire de la reprise de Kidal par l’armée malienne en 2023. Il y a un an, le soleil se levait sur un Mali qui retrouvait, non sans difficulté, l’un de ses territoires les plus disputés, une ville qui symbolisait autant la lutte contre les groupes armés que la quête d’unité nationale. La reprise de Kidal a marqué un tournant dans la reconquête de la souveraineté malienne, mais elle a également posé des questions cruciales sur l’avenir politique, sécuritaire et social du pays.

Kidal, une victoire militaire à concrétiser sur le plan politique

La prise de Kidal n’a pas seulement été une victoire pour l’armée malienne ; elle a été célébrée comme un symbole de la souveraineté retrouvée et comme la preuve éclatante que l’Alliance des États du Sahel (AES), fondée en septembre 2023, est née avec toutes ses 32 dents. Cette alliance stratégique entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger s’est affirmée avec force, prouvant sa capacité à agir collectivement pour repousser les menaces et défendre la souveraineté de chacun de ses membres. La reconquête de Kidal marque ainsi non seulement un tournant pour le Mali, mais aussi un renouveau dans les dynamiques de défense et d’unité pour les États du Sahel. 

En s’emparant de Kidal, l’armée malienne a envoyé un message clair : désormais, l’AES se tient prête à défendre chacun de ses membres et à assurer une protection collective face aux défis communs de la région. Depuis 2013, cette ville du nord était le bastion de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), une coalition de groupes armés touaregs et indépendantistes. Sa reprise a redonné espoir à un pays qui avait trop longtemps vu certaines de ses régions devenir des zones d’influence pour des forces rebelles et étrangères. Mais un an après, la question reste entière : comment transformer cette victoire militaire en stabilité durable et en paix pour les populations locales ?

Si l’on peut saluer le retour de Kidal sous l’autorité de l’État, il faut aussi admettre que cette reprise n’a pas mis un terme aux tensions. Pour de nombreux habitants de la région, les questions d’autonomie et de reconnaissance culturelle demeurent. L’armée malienne, forte de nouveaux partenariats internationaux, en particulier avec la Russie, a su reprendre ce bastion stratégique, mais les enjeux à long terme nécessiteront plus que des interventions militaires. Il s’agit, désormais, de s’assurer que la présence de l’État à Kidal ne se résume pas à des postes de contrôle, mais se manifeste dans les écoles, les hôpitaux, et les infrastructures qui manquent encore cruellement.

Des alliances géopolitiques pour renforcer la sécurité nationale

L’année écoulée a également montré l’importance de la reconfiguration des alliances stratégiques du Mali. La présence accrue de la Russie, le soutien militaire apporté par la Turquie et les partenariats économiques et sécuritaires avec la Chine ont permis au Mali de renforcer son armée, désormais équipée de drones, de radars, et de systèmes de surveillance modernes. Le pays s’affranchit peu à peu d’une dépendance traditionnelle à la France et à la MINUSMA, la mission des Nations Unies qui a quitté le Mali dans un contexte de désaccords et de repli international.

Ce recentrage sur de nouveaux partenaires est un choix que le gouvernement de transition a assumé et présenté comme une nécessité pour le respect de la souveraineté malienne. En réaffirmant l’importance de ces alliances dans la réussite de la reprise de Kidal, le Mali pose les jalons d’une politique d’indépendance stratégique, dans laquelle le choix des partenaires n’est plus dicté par les anciennes alliances historiques. Cependant, cette politique devra être manœuvrée avec finesse, car une trop grande dépendance vis-à-vis de ces nouveaux partenaires pourrait compromettre l’équilibre d’indépendance que le Mali recherche ardemment.

Un défi social et culturel à relever pour rétablir la cohésion

La reprise de Kidal, au-delà de la victoire militaire, a aussi mis en lumière les fractures culturelles et sociales du pays. Le nord du Mali, et Kidal en particulier, est une région marquée par une identité touarègue et saharienne, avec des revendications d’autonomie qui remontent bien avant les conflits récents. Pour le gouvernement malien, cette reprise doit également être l’occasion d’apaiser les tensions ethniques et de renouer avec les populations locales, qui ont longtemps perçu l’État central comme distant, voire oppressif. 

La mission de paix au Mali passe nécessairement par une intégration des spécificités culturelles du nord, qui devra être reconnue et respectée pour éviter un retour aux revendications d’autonomie armée. Le pays doit apprendre des erreurs du passé et faire de la diversité ethnique une force, non un facteur de division. Ce défi est complexe, car il nécessite d’allier autorité et ouverture, sécurité et inclusion, deux pôles que le Mali peine parfois à conjuguer.

L’avenir politique : transition et élections dans un contexte fragile

Enfin, à l’aube de cet anniversaire, l’avenir politique du Mali reste incertain. Les autorités de transition ont affirmé leur volonté de redonner le pouvoir à un gouvernement civil élu, et la tenue des élections est intervenir dans les prochains mois. Toutefois, dans un contexte de recomposition géopolitique et de tensions internes, ces élections seront un véritable test pour la solidité de la démocratie malienne et pour la capacité du pays à garantir une stabilité institutionnelle.

La reprise de Kidal peut-elle réellement se transformer en catalyseur de paix et de démocratie ? La question reste posée, d’autant que la transition devra démontrer qu’elle peut garantir la sécurité de tous les candidats, assurer une équité dans le processus électoral et intégrer les différentes régions du pays dans un projet commun. La libération récente de certaines personnalités politiques est un pas vers l’apaisement, mais il ne pourra compenser les fragilités institutionnelles si les bases d’un dialogue inclusif ne sont pas posées.

Kidal, un an après : construire une paix durable

Alors que le Mali entre dans cette semaine d’anniversaire, l’enjeu est de transformer la reprise de Kidal en une victoire durable et pacifique. Pour que cette reconquête militaire ne soit pas seulement une victoire symbolique, l’État malien doit faire preuve de diplomatie, d’ouverture et de pragmatisme. Le Mali se trouve à un tournant où la sécurité doit s’accompagner d’une vision politique forte, capable de dépasser les clivages et de bâtir une paix qui soit acceptée par tous.

La souveraineté ne peut se réduire à la seule présence de l’armée. Elle doit s’inscrire dans des institutions solides, des services publics accessibles et une justice qui s’étende sur tout le territoire. Si l’État malien parvient à relever ces défis, alors la reprise de Kidal marquera non seulement la victoire d’un jour, mais l’aube d’un Mali unifié, souverain et en paix.

Bakary Fomba


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