En débauchant Hilaire Diarra, figure respectée du secteur minier et ancien cadre stratégique de Barrick, les autorités maliennes de la transition marquent un point décisif dans le bras de fer engagé avec le géant canadien. Désormais, c’est l’État malien qui impose son tempo et non les multinationales.
Nouvelle déconvenue pour Barrick Mining. Après avoir vu, le 16 juin dernier, la mine stratégique de Loulo-Gounkoto placée sous administration provisoire, le groupe canadien vient de subir une nouvelle perte symbolique, mais hautement politique. Hilaire Bebian Diarra, ex-directeur général de la mine d’or de Tongon (Côte d’Ivoire), a été nommé en août conseiller spécial du président de la Transition, le général Assimi Goïta.
Un choix hautement stratégique
Spécialiste reconnu en sciences de la Terre, Diarra n’est pas un technicien ordinaire. C’est l’un des cadres les plus expérimentés du secteur aurifère ouest-africain, ayant longtemps travaillé au cœur des opérations de Barrick. Son ralliement à Bamako consacre une bascule. Le Mali, troisième producteur d’or du continent, démontre qu’il n’entend plus laisser à des sociétés étrangères le monopole du savoir-faire et du pilotage stratégique.
Cette nomination intervient dans un contexte où les autorités de Transition ont multiplié les signaux de fermeté vis-à-vis des multinationales extractives. L’or, ressource vitale qui représente près de 75 % des recettes d’exportation du pays, ne peut plus être un simple gisement de rente pour des intérêts extérieurs. L’arrivée de Diarra au palais de Koulouba illustre une logique désormais assumée. Il s’agit de transformer le capital humain et l’expertise locale en levier de souveraineté.
Un signal au-delà du Mali
Pour Barrick, la perte est double. D’un côté, le groupe est affaibli par la mise sous tutelle de Loulo-Gounkoto, fleuron de sa présence au Mali ; de l’autre, il voit l’un de ses anciens piliers régionaux rejoindre l’adversaire. Au-delà du symbole, c’est tout un rapport de force qui bascule. À Bamako, certains évoquent déjà « la fin du temps des concessions » où les États se contentaient de royalties symboliques en échange de ressources stratégiques.
Avec ce recrutement, le Mali laisse comprendre que le temps de la dépendance est révolu, place à l’affirmation souveraine. Dans le Sahel confédéré au sein de l’AES (Mali, Burkina Faso, Niger), cette décision est perçue comme une étape supplémentaire d’un processus irréversible, à savoir la maîtrise nationale des ressources naturelles.
Chiencoro Diarra
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