En marge de la célébration du 8 mars, Journée internationale des Droits des femmes, la jeune lycéenne tinusienne Mayssa Ben Mrad rend hommage à toutes les femmes et estime que « la liberté d’expression, d’opinion, est un chemin que nous devons apprendre à parcourir ensemble »
« A la mémoire, de toutes les femmes, sacrifiées sur l’autel de l’injustice sociale, des mœurs et traditions, à la mémoire de toutes ces femmes, qui nous ont permis, d’exister par nous-même, de nous affirmer et de librement nous exprimer »
Souvent ignorées de l’histoire de l’art, de la culture des sciences, longtemps soumises au bon vouloir d’un père ou d’un frère pour accéder à l’école ou à l’université, les femmes ont souvent brisé les chaînes, outrepassé les codes, en allant contre vents et marées, mais au prix de grands sacrifices.
Culte de la « Grande Déesse »
Comment une femme peut-elle se convaincre de pouvoir accéder à n’importe quel statut professionnel et affirmer la légitimité de son génie ; alors qu’elle n’a pas les mêmes droits sociaux, civils ou politiques que les hommes ?
Privée de ses droits les plus légitimes, exclue ; du droit de vote, écartée des cercles de décision, et ce jusqu’à y a pas longtemps, enfermée dans un statut discriminatoire issu des différentes juridictions, jurisprudences et normes sociales, voire d’une lecture erronée des droits divins, la femme est une mineure, inapte, lorsqu’elle est célibataire ; mariée, elle doit obéissance, voire révérence, à son époux.
Ces femmes qui ont dû subir différentes formes de marginalisation, qui ont souffert du modèle patriarcal depuis des lustres, de la préhistoire à la Grèce antique jusqu’à nos jours, auraient pourtant selon des études féministes, sur les sociétés préhistoriques, connu des formes de pouvoir matriarcal, fondées sur le culte de la « Grande Déesse ».
Les femmes longtemps cantonnées à certaines fonctions, métiers, aux tâches ingrates ; souvent réduites à leur genre ; ont dû prendre leur destin en main pour échapper aux contraintes des sociétés patriarcales. Autant dire que jusqu’au début du XXe siècle, le parcours des femmes artistes, savantes, écrivaines, poétesses était encore semé d’embûches.
Déclaration des droits de l’homme
Et voilà qu’une lueur d’espoir, se profila à l’horizon. La Déclaration des droits de l’homme en 1946 qui « garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme » ouvre de nouveaux horizons, de nouvelles perspectives, institutionnalise, un statut universel, pour la femme. Bien évidemment, le combat est loin d’être gagné, des résistances juridictionnelles s’installèrent de part et d’autre dans les deux hémisphères.
Plus qu’un thème de débat, plus qu’un sujet de discussion des tables rondes, au-delà du caractère festif, la liberté des femmes s’inscrit dans le cadre d’un éternel combat, et ce depuis la nuit des temps.
Avouons toutefois que ; les femmes qui ont dû faire face aux agressions délibérées qui se voyaient victimes des crimes d’honneur ; n’ont pas toutes brillé par leur silence et leur soumission, ne sont pas tombées dans le piège de la victimisation ou de la fatalité ; elles y ont cru, au gain de cause. Gardons, aussi, bien en mémoire et glorifions, des femmes qui se sont battues, en mettant parfois, en péril leurs vies, leur devenir. Aujourd’hui, on ne peut s’empêcher, nous femmes du monde de nous en enorgueillir, une journée internationale ayant été dédiée à la femme pour couronner ce long combat.
Le mouvement féministe en plein essor dès le début du XX ème siècle, renforcé par quatre conférences mondiales sur les femmes organisées sous l’égide de l’ONU, a aidé à faire de la célébration de cette Journée le point de ralliement des efforts coordonnés déployés pour exiger la réalisation des droits des femmes et leur participation au processus politique et économique.
Une lecture historique du 8 mars
Depuis des années, le 8 mars, la Journée internationale de la femme a pris une nouvelle dimension mondiale dans les pays développés comme dans les pays en développement. Le 28 février 1909, une « Journée nationale de la femme » (National Woman’s Day) est célébrée aux États-Unis à l’appel du Parti socialiste d’Amérique.
En 1910 à Copenhague, lors de la IIe conférence internationale des femmes socialistes est adoptée l’idée d’une « Journée internationale des femmes » sur une proposition de Clara Zetkin (Parti social-démocrate d’Allemagne), sans qu’une date soit avancée.
L’Internationale socialiste des femmes célèbre le 19 mars 1911 la première « Journée internationale des femmes » et revendique le droit de vote des femmes, le droit au travail, à la formation, et la fin des discriminations au travail, en Allemagne, en Autriche, au Danemark et en Suisse. Plus d’un million de personnes participent aux rassemblements.
1913-1914 – Dans le cadre du mouvement pacifiste qui fermentait à la veille de la Première Guerre mondiale, les femmes russes ont célébré leur première Journée internationale de la femme le dernier dimanche de février 1913. Dans les autres pays d’Europe, le 8 mars ou à un ou deux jours de cette date, les femmes ont tenu des rassemblements soit pour protester contre la guerre, soit pour exprimer leur solidarité avec leurs sœurs.
1917 – Deux millions de soldats russes ayant été tués pendant la guerre, les femmes russes ont de nouveau choisi le dernier dimanche de février pour faire la grève afin d’obtenir « du pain et la paix ». Les dirigeants politiques se sont élevés contre la date choisie pour cette grève, mais les femmes ont passé outre. Le reste se trouve dans les livres d’histoire : quatre jours plus tard, le tsar a été obligé d’abdiquer et le gouvernement provisoire a accordé le droit de vote aux femmes.
1975 : Lors de l’Année internationale de la femme, l’Organisation des Nations Unies a commencé à célébrer la Journée internationale des droits des femmes le 8 mars.
Des femmes qui ont changé le monde
Plusieurs femmes ont marqué l’histoire, nous ont inspirées et servies de modèle. Elles ont gouverné et régné sur des nations et des populations entières comme l’impératrice Sissi et Angela Merkel. Elles ont lutté contre la marginalisation et la ségrégation raciale comme Rosa Parks. Elles ont parfois risqué leur vie pour venir en aide à leur pays.
Rosa Parks qui, en 1955 refuse de céder sa place à un passager blanc dans le bus. Malgré les risques, elle lutte toute sa vie contre la ségrégation raciale et finit même par rejoindre les rangs de Martin Luther King.
C’est au prix de longs combats que les femmes ont fini par briser, les notions stéréotypées qui considèrent la science, la médecine, les maths comme étant des domaines réservés uniquement aux hommes. Et je ne peux m’empêcher de citer l’excellente Marie Curie qui a été la seule femme de l’histoire qui s’est vue décernée deux prix Nobel. L’un en physique pour ses travaux sur la radioactivité et l’autre en chimie. Les exemples se succèdent et ne se ressemblent pas. Les femmes ont en effet prouvé leur résilience et leurs aptitudes au sport comme Billie Jean King qui a gagné le fameux premier match de tennis contre un homme, prénommé « la bataille des sexes ».
Mère Teresa, qui pendant plus de 40 ans, voua sa vie aux populations fragilisées. D’abord en Inde puis dans d’autres pays, elle crée des orphelinats, des écoles et des maisons d’accueil pour les personnes atteintes de maladies comme la lèpre ou le sida.
Des femmes pionnières en Tunisie
De l’autre côté de la méditerranée, la Tunisie, pays des grandes civilisations, nous avons également connu plusieurs femmes pionnières comme la Kahena (686-704), une reine guerrière berbère qui unifia les tribus amazigh pour contrer les invasions islamiques. Elle gagna deux batailles face aux musulmans et réussit à régner sur toute l’Ifriqiya pendant cinq ans. Elle sera la seule femme de l’histoire à combattre l’empire omeyyade.
Aziza Othmana (1606-1669) ; petite fille du Sultan Othman Dey et épouse de Hamouda Pacha, est une princesse tunisienne au grand cœur. En effet, elle affranchissait les esclaves et les prisonniers de guerre, offrit la totalité de ses biens au profit d’œuvres caritatives et participa au financement de l’actuel hôpital Aziza Othmana.
Et maintenant, je voudrais parler d’une femme qui a brillé dans la lutte féministe tunisienne, et dont j’ai l’honneur de faire partie de la même famille, Bchira Ben Mrad (1913-1993). Parler du premier mouvement féminin en Tunisie revient inéluctablement à la reconnaissance de Bchira Ben Mrad en tant que première dame à penser, durant les années 1930, à créer une organisation féminine.
Bchira Ben Mrad a fondé en 1936 l’Union musulmane des femmes en Tunisie (Umft), organisme qu’elle a présidé de 1936 à 1956 et c’est en 1936 que cette militante organise la première réunion féministe pour soutenir la cause du mouvement national. Elle a contribué dans une large mesure, à la prise de conscience de la société en général et des femmes en particulier.
Signalons que, dans ce même ordre d’idée, Bchira glorifia Taouhida Ben Cheikh, la première doctoresse arabe musulmane et tunisienne, 1ère dame médecin depuis 1937.
Aujourd’hui, grâce à ces icônes, de plus en plus de femmes qui participent au combat pour l’égalité des sexes et leurs voix se font certainement entendre. J’aimerais dire : que chaque jour soit le jour de la femme !
Et pour terminer je dirais
« La liberté d’expression, d’opinion, est un chemin que nous devons apprendre à parcourir ensemble »
Mayssa Ben Mrad, élève du Lycée Pilote Hammam-Lif
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