Ce 7 août, la Côte d’Ivoire célèbre le 64e anniversaire de son accession à l’indépendance. Une occasion de fête pour le peuple ivoirien, mais aussi un moment de réflexion sur la véritable nature de cette indépendance. L’écrivain ivoirien, Sylvain Takoué, critique vivement ce qu’il appelle une « fausse indépendance », soulignant la présence persistante de bases militaires étrangères sur le sol ivoirien.
Depuis longtemps, la Côte d’Ivoire héberge une base militaire française. Cette présence, ancrée dans l’histoire post-coloniale, est perçue par certains comme une continuation de la domination étrangère. La situation se complique avec l’annonce récente de l’installation prochaine d’une base militaire américaine à Odienné, dans le nord du pays. Ce redéploiement est décidé par le gouvernement ivoirien sans véritable consultation publique, renforçant le sentiment de dépendance et de manque de souveraineté nationale.
Le contexte géopolitique et ses implications
Le redéploiement des troupes américaines en Côte d’Ivoire survient alors que les États-Unis sont poussés vers la sortie par plusieurs pays du Sahel. Cette reconfiguration géopolitique fait écho à une dynamique régionale où les anciennes puissances coloniales et leurs alliés réajustent leur présence militaire. En Côte d’Ivoire, cette décision soulève des questions sur l’autonomie décisionnelle du pays et son rôle dans la stratégie militaire des puissances occidentales.
En outre, l’Allemagne envisage également de relocaliser une base militaire sur le sol ivoirien après son retrait du Niger. Ce mouvement suit une tendance où les puissances européennes cherchent à maintenir une influence stratégique en Afrique de l’Ouest, malgré les résistances croissantes de certaines nations à la présence militaire étrangère.
Les réactions politiques et sociales
Pour l’écrivain ivoirien, cette accumulation de bases militaires étrangères est la preuve d’une indépendance incomplète. Il affirme que tant que des forces étrangères disposeront de telles infrastructures en Côte d’Ivoire, le pays ne pourra pas véritablement exercer une souveraineté totale. Cette critique rejoint un sentiment plus large partagé par de nombreux Africains, qui voient dans ces bases militaires un vestige du passé colonial et une forme de néocolonialisme.
Le gouvernement ivoirien justifie ces accords militaires par la nécessité de garantir la sécurité nationale dans un contexte régional instable. La lutte contre le terrorisme et les menaces transnationales est souvent avancée comme argument principal. Toutefois, cette position est de plus en plus contestée par une partie de la population et par des intellectuels qui y voient une atteinte à la dignité et à l’indépendance nationales.
Sur le plan social, cette situation alimente des débats houleux sur les réseaux sociaux et dans les médias. Les citoyens ivoiriens sont partagés entre la reconnaissance des besoins sécuritaires et la volonté de voir leur pays se libérer de toute tutelle étrangère. Des manifestations sporadiques et des appels à une plus grande transparence et à un débat national sur ces questions militaires émergent de divers secteurs de la société civile.
Vers une réévaluation de l’indépendance
Le 64e anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire est ainsi marqué par des questionnements profonds sur la nature réelle de cette indépendance. La présence militaire étrangère reste un sujet de controverse, mettant en lumière les tensions entre la nécessité de sécurité et le désir d’autonomie nationale.
Pour que la Côte d’Ivoire puisse avancer vers une indépendance véritablement souveraine, il est crucial que ces questions soient abordées de manière transparente et participative. Un dialogue national impliquant toutes les couches de la société est indispensable pour redéfinir les termes de cette indépendance et pour garantir que les décisions prises en matière de défense et de sécurité reflètent véritablement la volonté du peuple ivoirien.
Le défi pour la Côte d’Ivoire, comme pour de nombreux autres pays africains, est de naviguer entre les impératifs sécuritaires et les aspirations légitimes à une souveraineté pleine et entière, loin des influences et des intérêts des anciennes puissances coloniales et de leurs alliés contemporains.
Chiencoro Diarra
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