Amnesty International documente plusieurs exactions commises par les armées nationales contre les civils dans certains pays du Sahel. Dans son rapport, « Ils en ont exécuté certains et emmené d’autres avec eux » : Péril pour les populations civiles dans le sahel, cette organisation internationale de protection des droits de l’homme dénonce l’impunité. Ce rapport a été publié ce mercredi 10 juin 2020.
Des exécutions extrajudiciaires et des homicides illégaux, tels sont les violations des droits de l’homme que reproche Amnesty International aux forces de sécurité du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Ce rapport d’une vingtaine de pages recense au total 199 incidents contre les civils dans ces trois pays du Sahel. Au moins 57 exécutions extrajudiciaires et 142 cas de disparition forcée ont été documentés par cette organisation internationale des droits de l’homme. Les forces de sécurité nationale seraient l’auteure de ces exactions. Toutes ces bavures ont lieu entre février et avril 2020, précise la même source.
Les civils pris pour cible
« Quand les soldats sont arrivés, ils se sont mis à tirer. Plusieurs villageois ont fui, ceux qui se trouvaient près de la mosquée ont donné l’alerte et plusieurs autres se sont réfugiés dans la brousse, à l’extérieur du village. L’éleveur faisait partie du deuxième groupe, mais il n’a pas pu gagner la brousse. J’étais parmi ceux qui fuyaient. J’ai pu m’échapper, mais pas lui ». Ces propos d’un témoin de sévices de l’armée malienne ont été rapportés par Amnesty International dans ce nouveau rapport publié ce mercredi 10 juin 2020.
Ces bavures surviennent dans le cadre de l’engagement des pays du G5 Sahel à intensifier les opérations militaires contre les groupes terroristes évoluant dans la zone de Ségou au Mali, de Ouahigouya et Djibo au Burkina Faso et d’Ayorou au Niger. Ces opérations ont été caractérisées par ces « graves atteintes aux droits humains à l’encontre des populations », précise-t-on dans ce rapport.
Dans la plupart des cas, il s’agit d’exactions qui surviennent après que la position de l’armée ait été attaquée dans la localité où elles sont commises.
Dans son rapport trimestriel de janvier-mars 2020, la MINUSMA reproche à l’armée malienne 101 exécutions extrajudiciaires, 32 cas de disparitions forcées et 32 cas de torture et de traitements inhumains au cours de cette année.
Une situation préoccupante
Amnesty International se dit très préoccupée par ces « violations et abus répétés des droits humains commis par les groupes armés et les forces de sécurité au sahel ». Elle recommande alors que les présumées coupables de ces exactions soient traduits devant la justice. Elle demande également que toute la lumière soit faite sur les disparitions forcées et aussi de s’imprégner sur le sort réservé aux personnes arrêtées. Amnesty International lance enfin un appel aux « institutions intergouvernementales régionales et internationales ainsi que les organismes de défense des droits humains et les États tiers à
dénoncer les violations perpétrées par les armées dans le Sahel ». Aux gouvernements du Mali, du Burkina Faso et du Niger, elle recommande le respect des engagements internationaux.
Aller au-delà de simples recommandations
Dans ces genres de situations, de simples recommandations suffisent-elles pour rendre justice aux victimes, vaincre l’impunité ? Ce n’est pas la première fois qu’au Mali des rapports mettent en cause l’armée malienne dans des violations de droits de l’homme. Elle est pointée du doigt dans l’assassinat de 29 civils à Binedama dans la région de Mopti (centre du Mali). Comme toujours, les enquêtes sont en cours.
A chaque fois que des exactions sont commises, les mêmes recommandations de lutte contre l’impunité tombent. Il est temps que les organisations de défense des droits de l’homme prennent leur responsabilité entière en mettant en place des mesures leur permettant de forcer la main au gouvernement malien pour la mise en œuvre des recommandations qu’elles font. Ceux qui sont censés protéger les civils ne peuvent pas continuer à semer la terreur en toute impunité.
Togola
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