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Pourquoi de plus en plus de jeunes Maliens choisissent de rester célibataires

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À Bamako, le célibat volontaire prend de l’ampleur. Selon la Septième Enquête Démographique et de Santé du Mali (EDSM-VII 2023–2024, INSTAT), la proportion de célibataires est plus élevée chez les hommes (47 %) que chez les femmes (21 %). Pour certains, ce célibat s’explique par des contraintes économiques ou des expériences douloureuses ; pour d’autres, il s’agit d’un choix réfléchi, inspiré par la quête de liberté, de réussite professionnelle ou d’indépendance. Le mariage n’est donc ni rejeté ni abandonné, mais redéfini selon les priorités de chacun.

Dans les rues animées de la capitale, des grins aux marchés bondés, les jeunes discutent, travaillent ou prennent le thé. La statistique officielle révèle que près d’un homme sur deux reste célibataire, contre une femme sur cinq. Derrière ces chiffres se cache une mosaïque de motivations, entre désir de liberté, difficultés financières et prudence face à l’engagement.

Stabilité financière et respect mutuel

Pour beaucoup, rester seul n’est pas un choix mais une nécessité. Amadou Traoré, 27 ans, conducteur de moto-taxi à Djaneguela, rêve de mariage. « J’aimerais me marier, mais je n’ai pas encore les moyens de payer la dot ni de m’installer », confie-t-il. Aminata Coulibaly, 22 ans, vendeuse de beignets, ajoute : « Beaucoup de jeunes filles veulent se marier, mais elles savent que sans moyens, ça restera un rêve. Alors elles attendent, parfois longtemps. »

D’autres, au contraire, privilégient leur liberté. Fatoumata Diarra, 24 ans, étudiante en commerce, explique : « Être mariée signifie moins de liberté. Je préfère profiter de ma vie et faire ce que je veux. » Souleymane Koné, 29 ans, employé dans une librairie, abonde dans le même sens : « Pour moi, le mariage n’est pas une obligation. Je préfère voyager, travailler, rencontrer des gens, avant de me lancer dans une vie de couple. »

Certaines jeunes femmes, elles, voient dans le célibat une stratégie. Aïssatou Sangaré, 26 ans, employée dans une agence de communication, affirme : « Je ne veux pas m’engager à n’importe quel prix. Je préfère attendre quelqu’un qui pourra m’offrir une sécurité. » Kadiatou Cissé, 27 ans, complète : « J’ai des exigences claires pour mon futur mari : stabilité financière et respect mutuel. Si ça ne correspond pas, je préfère rester célibataire. »

Entre expériences passées et modèles de célébrités

Pour d’autres encore, ce choix découle d’expériences douloureuses. Moussa Diarra, 30 ans, se souvient : « Je me suis marié très jeune et ça n’a pas marché. Depuis, je préfère rester seul. » Mariam Bengaly, 28 ans, confie : « J’ai vécu une relation difficile qui m’a appris à ne pas me précipiter. Désormais, je prends le temps de me connaître avant de songer au mariage. »

Les modèles de célébrités influencent aussi les jeunes. Ousmane Traoré, 23 ans, étudiant en finance, explique : « Je regarde Sidiki Diabaté, Cristiano Ronaldo… Ils ont tout pour eux et pourtant, ils repoussent le mariage pour leur carrière. Ça m’inspire. Je veux réussir d’abord, faire fortune, avant de me marier. Comme on dit : “Si tu veux changer le monde, fais-le en étant célibataire. Une fois marié, même ta télécommande ne t’appartiendra plus.” »

Pressions sociales et sagesse des aînés

À ce tableau s’ajoute la pression sociale. Ibrahim Sangaré, 25 ans, raconte : « Dans ma famille, le mariage est obligatoire à un certain âge. Mais je ne me sens pas prêt. Pour éviter les conflits, je reste célibataire et j’encaisse la pression de mes parents. » Fatou Coulibaly, 23 ans, étudiante en droit, nuance : « Beaucoup de jeunes filles subissent les pressions familiales, mais choisissent d’attendre pour éviter un mariage malheureux. »

Le regard des aînés apporte une note d’équilibre. Mariama Diarra, 52 ans, mariée depuis 30 ans et mère de trois enfants, conseille : « Je ne juge pas les jeunes qui restent célibataires. Chacun a ses raisons. Mon conseil, c’est de ne pas se précipiter et de construire son avenir avant de s’engager. »

Ainsi, à Bamako, le célibat — qu’il soit choisi ou subi — ne reflète pas seulement un rejet du mariage. Il traduit un mélange complexe de contraintes économiques, de stratégies personnelles, d’expériences passées, d’attentes sociales et culturelles, mais aussi de nouvelles aspirations portées par les jeunes générations.

Cheickna Coulibaly


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