Le Mali franchit une étape décisive dans sa quête de souveraineté minière. Avec l’octroi du permis d’exportation du concentré de spodumène pour le projet de Bougouni, Bamako s’invite dans la compétition mondiale autour du lithium, ce métal stratégique pour la transition énergétique. Entre encadrement des prix, contenu local obligatoire et retombées fiscales, l’État malien impose désormais ses règles et entend transformer l’« or blanc » en véritable levier de puissance nationale.
Il faut parfois savoir lire entre les lignes d’un communiqué sec et technique pour en mesurer la portée géopolitique et économique. En l’occurrence, c’est une petite révolution discrète qui s’annonce à Bougouni, dans le sud du Mali. Kodal Minerals Plc, société britannique cotée à Londres, a confirmé le 4 septembre avoir obtenu le précieux permis d’exportation pour le concentré de spodumène – autrement dit, du lithium, ce métal rare devenu l’or blanc de la transition énergétique mondiale.
Lithium de Bougouni, une étape cruciale franchie
Derrière cette autorisation officielle, signée de la main du ministre malien des Mines, le professeur Amadou Keïta, se dessine un tournant stratégique pour Bamako. Car le permis ne se limite pas à donner le feu vert à l’expédition des 125 000 tonnes initiales de concentré : il impose aussi un cadre de souveraineté renforcée. Le mécanisme de tarification suivra désormais les références du Shanghai Metal Market (SMM), tout en laissant aux autorités maliennes le droit de corriger et vérifier les prix. Le transport, lui, devra obligatoirement passer par des sociétés de logistique locales, en vertu de la loi sur le contenu local votée en août 2023. Et, bien entendu, impôts, taxes et prélèvements alimenteront directement le Trésor public malien.
C’est dire si ce feu vert traduit une volonté politique claire de l’État malien : tirer parti de la ruée mondiale sur le lithium, tout en s’assurant que la manne profite à l’économie nationale. Kodal, qui détient 49 % de sa filiale malienne Les Mines de Lithium de Bougouni SA, ne s’y trompe pas. « L’octroi de cette licence est une étape cruciale pour le développement du projet Bougouni », a reconnu son PDG, Bernard Aylward, saluant au passage le soutien appuyé du gouvernement de transition.
Le Mali n’entend pas rater le train de la révolution énergétique mondiale
Dès l’achèvement des dernières formalités administratives, une flotte de camions maliens prendra la route vers le port d’Abidjan pour exporter les premières cargaisons. Le Mali, jusque-là géant de l’or, s’apprête donc à devenir une puissance montante du lithium. Et cette bascule intervient à un moment où la Confédération des États du Sahel (AES) entend affirmer son autonomie économique face aux dépendances anciennes.
Une page est en train de s’écrire à Bougouni : celle d’un pays qui transforme ses ressources en leviers de souveraineté, et d’un Sahel qui, pour une fois, entend ne pas rater le train de la révolution énergétique mondiale.
Chiencoro Diarra
En savoir plus sur Sahel Tribune
Subscribe to get the latest posts sent to your email.