Le Mali perd sa place de 99e en 2021, pour se jauger un accablant classement de 111e sur 180 pays, dans le classement mondial 2022 de la liberté de la presse par le Reporter sans frontière. Beaucoup de ses voisins sahéliens restent résilients et dynamiques dans le cadre du respect de la liberté d’informer, même si le tableau est un peu sombre dans la sous-région.
Le Mali a fait son baptême de feu dans la pluralité des médias à partir de la chute du régime dictatorial de Moussa Traoré en 1991. Le pays concentre aujourd’hui plus de 120 journaux, 500 radios au moins, des dizaines de chaînes de télévision, y compris dans les régions. Ces organes de presse viennent rivaliser avec les médias publics, ORTM (audiovisuels) et ESSOR (Presse écrite).
« La dégradation de la situation sécuritaire, conjuguée au durcissement de la junte arrivée au pouvoir en 2020, compromet la sécurité et l’accès des journalistes aux informations », analyse le RSF dans son rapport.
Le Niger, premier rang sahélien
La région du Sahel, regroupant certains pays ouest-africains et une partie de l’Afrique centrale, peine toujours à desserrer l’étau du terrorisme qui l’annihile depuis presque une décennie. Marqué par une crise sécuritaire dramatique, l’exercice du métier de l’information est très compromettant. Ce qui s’illustre par le kidnapping du journaliste français Olivier Dubois, enlevé au nord du Mali depuis avril 2021, et qui se trouve toujours dans la geôle des jihadistes. Deux journalistes espagnols ont été tués au Burkina Faso (41e). Il s’agit de Claude Verland et son confrère. Ajouté à cela, la suspension de la Radio France Internationale (RFI) au Mali et au Burkina Faso, par les militaires au pouvoir.
Selon le classement RSF, le Burkina Faso, 37e en 2021, se positionne à la 41e place, alors que le pays des Hommes intègres était récemment considéré comme un champion du continent en matière de respect de la liberté de presse. Il régresse dans son rang, mais reste dynamique et résilient contrairement à son voisin malien qui a fait une chute spectaculaire en moins d’une année.
Tous deux dirigés par des militaires issus de coups d’État, le résultat du Burkina résulte de la montée de l’insécurité, et l’instabilité politique liée aux putschs qui font peser de sérieux risques en matière de sécurité et d’accès à l’information pour les journalistes.
Le Niger empoche le premier rang du classement sahélien en se positionnant de nouveau 59e en 2022. Malgré la baisse encourageante d’atteinte à la liberté de la presse, la crise sécuritaire qui sévit dans la région a un impact significatif sur la sécurité et l’accès à l’information pour les journalistes.
Le Tchad fait des progrès
Le Tchad, quant à lui, se positionne au 104e rang, alors qu’il occupait en 2021, le 123e. Il reste donc l’un des pays le plus résilient et dynamique dans la région sahélienne, nonobstant la situation politique et sécuritaire très instable, qui fait peser de sérieux ennuis à l’exercice du journalisme. La mort d’Idriss Deby Itno en avril 2021 n’offre pour l’instant aucune nouvelle issue pour la démocratisation du pays.
Malgré son statut d’État islamique, la Mauritanie aussi reste résiliente en matière de liberté de la presse, elle se classe 97e en 2022 en perdant sa place de 94e en 2021. Depuis la dépénalisation des délits de presse, il y’a une décennie, les journalistes peuvent travailler dans des conditions moins répressives, tout en vivant dans une grande précarité, comme au Mali.
Le Sénégal aussi régresse
La Côte d’Ivoire reste la plus dynamique parmi ses voisins ouest-africains, en progressant de la 66e place en 2021, à la 37e en 2022. Elle dispose d’un paysage médiatique parmi les plus politisés et polarisés d’Afrique de l’Ouest. Toutefois, certains journalistes ne sont pas épargnés par les attaques et agressions.
Le pluralisme des médias est bien réel en Guinée et les journalistes jouissent d’une certaine liberté de ton, contrairement à sa sœur malienne. Occupant le 109e rang en 2021, la Guinée progresse en 2022 pour occuper le 84e rang du classement mondial de RSF.
Le nouveau régime militaire issu également du coup d’État de septembre 2021 est fortement attendu au tournant sur les questions concernant la liberté de la presse.
Quant au Sénégal, qui est un modèle de démocratie, la plus stable en Afrique de l’Ouest francophone, il a perdu énormément au bout d’une année. Du 49e rang en 2021, il se retrouve au 73e en 2022. Un résultat moins encourageant. Cela résulte du pluralisme médiatique entiché par une domination farouche de la politique dans le traitement de l’information, notamment par les journaux.
Mohamed Camara
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