Quatre paysans tués, une femme brûlée vive, des cases en cendres. La nuit du 24 au 25 août, un hameau ivoirien s’est réveillé en champ de ruines. Officiellement, des « individus armés non identifiés ». Officieusement, la preuve qu’en Côte d’Ivoire, malgré les discours rassurants d’Abidjan et ses alliances occidentales, la menace jihadiste rôde toujours.
Le communiqué de l’armée ivoirienne se veut sec et factuel : quatre morts, un disparu, un bétail emporté, les assaillants en fuite. Mais derrière ces lignes sèches, Difita rejoint la longue liste des villages sahéliens martyrisés. Première attaque meurtrière depuis 2021 sur le sol ivoirien, l’événement sonne comme un rappel brutal : la frontière de 600 km avec le Burkina Faso n’est pas une ligne sur une carte, mais une plaie ouverte.
Un modèle sécuritaire en question
À Abidjan, on répète que « la situation est préoccupante, mais sous contrôle ». Formule rassurante, répétée à l’envi depuis 2020, date de l’attaque de Kafolo qui avait décimé une garnison entière. Depuis, la Côte d’Ivoire a multiplié les coopérations internationales, invité la France à rester son parapluie sécuritaire, lancé des programmes sociaux dans le Nord pour occuper la jeunesse. Résultat ? Difita est en cendres.
La vérité est plus crue : la dépendance à des partenariats déséquilibrés n’a jamais protégé un pays de la pluie des balles. L’armée ivoirienne est vaillante, mais elle reste corsetée dans une stratégie qui n’est pas la sienne.
AES : l’autre pari
À Ouagadougou, Bamako et Niamey, les dirigeants de l’Alliance des États du Sahel (AES) ont choisi une autre voie : souveraineté militaire, mobilisation populaire, partenariats débarrassés des complexes coloniaux. On peut ironiser sur la rhétorique martiale des autorités sahéliennes, mais force est de constater que leur réponse est de combattre l’ennemi sur le terrain, avec leurs propres règles.
Là où Abidjan continue de se blottir sous le parapluie occidental, ses voisins sahéliens ont décidé de marcher sous l’orage sans parapluie. Risqué, mais assumé. Et, surtout, porteur d’une idée qui séduit : celle d’une Afrique qui prend son destin en main.
Une leçon de Difita
Le drame de Difita n’est pas qu’un fait divers. C’est un révélateur. La Côte d’Ivoire est rattrapée par la même réalité que ses voisins. Le terrorisme ne s’arrête pas aux frontières, il s’y faufile. Et la souveraineté n’est pas un slogan de tribune, mais une stratégie de survie.
Abidjan a deux options : persister dans une sécurité sous-traitée à Paris et aux ONG, ou regarder du côté de l’AES, qui a fait de la souveraineté un étendard. Difita, petit hameau oublié du nord-est ivoirien, pose une grande question politique : faut-il rester sous tutelle ou apprendre à marcher seul, au risque de se mouiller ?
A.D
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