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AES, le nouveau souffle d’une Afrique sahélienne souveraine

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La Confédération des États du Sahel (AES) s’affirme peu à peu comme un nouveau paradigme dans la coopération régionale, au moment où la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) vacille sous le poids des crises internes et des ruptures politiques. Dans un contexte où le Mali, le Burkina Faso et le Niger redéfinissent leurs relations avec leurs partenaires, l’émergence de l’AES illustre une volonté de réinvention, tout autant qu’une réponse aux frustrations accumulées à l’égard des structures traditionnelles jugées inadaptées aux réalités sahéliennes.

Créée dans l’élan des transitions politiques dans ces trois États sahéliens, l’AES pourrait devenir une plateforme régionale capable de répondre aux défis pressants d’un territoire marqué par l’instabilité, le terrorisme et les crises socio-économiques. Mais son ambition ne s’arrête pas là. À la faveur d’un élargissement évoqué par des figures comme Robert Dussey, chef de la diplomatie togolaise, et des rapprochements stratégiques amorcés par le Ghana, l’AES semble s’inscrire dans une dynamique plus vaste : celle d’une Afrique décidée à se réapproprier ses priorités.

Le Togo, par exemple, pourrait rejoindre cette alliance sous la pression de sa population, lassée par une CEDEAO perçue comme bureaucratique et complaisante envers certaines élites. Le Ghana, sous la présidence de John Dramani Mahama, a également envoyé des signaux clairs d’une reconfiguration de sa diplomatie régionale. À travers ces possibles adhésions, l’AES pourrait transcender son rôle actuel et devenir un véritable laboratoire de refonte de la coopération interafricaine.

Cependant, cette émergence soulève des interrogations profondes. La CEDEAO, longtemps considérée comme un moteur de la stabilité régionale, pourrait voir son influence s’effriter, voire se réduire à une structure minimale. Que signifierait un affaiblissement de cette organisation, déjà mise à mal par les départs du Mali, du Niger et du Burkina Faso ? La perte de ces trois États, stratégiquement cruciaux, pourrait marquer un tournant dans la question sécuritaire en Afrique de l’Ouest.

Renforcer les capacités des États africains

De plus, l’intégration de nouveaux membres au sein de l’AES n’est pas sans risques. Comment éviter que les aspirations divergentes des États membres ne freinent la cohésion de l’alliance ? Une coalition aussi ambitieuse peut-elle vraiment maintenir une vision commune sans s’enliser dans les rivalités nationales ?

Malgré ces défis, l’AES incarne la promesse d’une coopération plus ciblée, adaptée aux besoins spécifiques des pays sahéliens. En mettant en avant des problématiques telles que la gestion des ressources naturelles, la lutte contre le terrorisme et la sécurisation des échanges commerciaux, cette alliance peut offrir une alternative crédible aux mécanismes traditionnels.

Elle porte également en elle l’espoir d’une solidarité renouvelée face à des menaces globales. À l’heure où les grands partenaires internationaux peinent à apporter des solutions durables, l’AES pourrait renforcer les capacités des États africains à répondre collectivement à leurs propres défis.

L’histoire des grandes alliances

Pourtant, cette initiative, aussi prometteuse soit-elle, devra surmonter ses propres contradictions. La solidarité qu’elle prône pourrait vite se heurter à des divergences d’intérêts, tandis que son succès dépendra de la capacité des États membres à transcender leurs égoïsmes nationaux.

Dans un Sahel marqué par les turbulences et les incertitudes, l’AES se présente comme une réponse à la fois urgente et symbolique. Mais elle est aussi un test pour l’Afrique : celui de savoir si le continent peut réellement se réinventer de l’intérieur, en mettant de côté les structures héritées pour bâtir des institutions enracinées dans ses réalités et aspirations.

Comme souvent dans l’histoire des grandes alliances, le chemin sera sinueux. Mais c’est précisément dans ces moments d’incertitude que se dessinent les opportunités d’un avenir réinventé. Si l’AES parvient à transformer les tensions en force motrice, elle pourrait bien devenir un modèle pour toute l’Afrique — et au-delà.

Bakary Fomba


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