Home Art et Culture À cause du Covid-19, Bina n'exercera plus le commerce

À cause du Covid-19, Bina n'exercera plus le commerce

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Dans ce billet fictionnel, je fais voir l’impact des mesures prises, notamment le couvre-feu, dans le cadre de la prévention contre le Covid-19 sur les commerçants. Beaucoup de ces travailleurs de l’informel traversent une des périodes les plus dures de leur existence.

Depuis l’annonce des premiers cas de cette tragédie sanitaire mondiale, le cri des commerçants ne connait plus de répit. D’une part, parce que les clients ont de plus en plus peur de sortir. D’autre part, parce que le prix des produits a grimpé pour diverses raisons. D’autre part encore, parce qu’il y a le couvre-feu qui limite les heures de travail.

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Bina, le tonton de la petite Amina, est vendeur de matériels électroniques au marché de Dibidani dans la capitale de l’Indifférence. Le jeune Bina, qui n’a connu d’autres activités que celle-ci depuis qu’il a abandonné ses études en classes de 6e année, partait jusqu’en Chine pour se ravitailler en matériels électroniques de tout genre. D’autres commerçants venaient aussi les acheter avec lui pour les revendre.

Avec la fermeture des frontières et l’instauration d’un couvre-feu de 21 h à 5 h du matin ainsi que de la réglementation des heures d’ouverture et de fermeture des marchés à l’Indifférence, la situation se complique pour le tonton d’Amina.  

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Comme si tous ceux-ci ne suffisaient pas, d’autres malheurs vont s’abattre sur le jeune commerçant à cause de son entêtement et de son indifférence à cette maladie.

Il est 21 h 30 min. Aujourd’hui, depuis 17 h, l’affluence des clients dans la boutique de Bina est grande. Il est alors de bonne humeur. Des téléphones, des boomeurs, des montres, des ampoules, des batteries et bien d’autres matériels coulent à flots faisant énormes revenus aux jeunes Bina.

Il finit ainsi par oublier qu’il est déjà l’heure du couvre-feu. Or, depuis 21 h moins 15, les clients se sont faits rares. Mais l’avidité régnante, le jeune commerçant espéraient sur d’autres clients. Quelques minutes plus tard, un passant, une de ses connaissances sûrement, le rappelle de l’heure du couvre-feu. À la hâte, il ramasse toutes les marchandises disposées au-dehors, devant la boutique, et les range rapidement à l’intérieur. Alors qu’il s’apprêtait de sortir pour fermer les portes, un Pick-up se gare devant sa boutique. Des hommes en uniforme descendent rapidement et lui demandent de s’écarter de la porte.

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  • Pourquoi dois-je dégager de la porte de ma boutique ? demande-t-il. Qu’est-ce que vous me voulez ? Attendez, on peut trouver un arrangement ? Ne prenez pas mes marchandises !

Un homme en uniforme, grand et costaud, sûrement le chef de l’équipe, demande à ses agents de ne plus toucher aux marchandises. Il se rapproche de Bina.

  • Alors, on laisse tes marchandises, mais tu nous paies 100 000 FCFA. À toi de voir.

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Après plusieurs réflexions, Bina rentre dans la boutique pour chercher la somme demandée.

Durant cette journée, il avait réussi à faire une vente de 200 000 FCFA. Il était très content. Mais voilà qu’on vient lui extorquer 100 000 FCFA sans aucun reçu.

Les agents en patrouille récupèrent l’argent avec joie et poursuivent leur chemin. 

Bina ferme sa boutique, prend son véhicule, démarre et emprunte la voie principale qui mène chez lui. Il démarre pour une course de quelque 20 kilomètres. Pendant qu’il conduisait, il priait Dieu pour qu’il ne rencontre plus d’autres hommes en uniforme en cours de route. Mais on dirait que Dieu n’a pas voulu l’écouter aujourd’hui à cause de son indifférence et de son entêtement.

Arrivé au dernier quartier avant le sien, il voit d’autres hommes en uniforme lui barrer la route. Ils ont aussi un Pick-up garé juste à côté de la route principale. Les reconnaissant à leur uniforme, il a tout de suite su qu’il s’agissait bien d’autres agents de la police en patrouille dans le cadre du couvre-feu. Mais aucun moyen de les fuir. Alors, il ralentit et finit par freiner. Il fait descendre la vitre droite pour pouvoir parler à l’agent qui s’approchait de lui.

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  • Bonsoir monsieur, dit l’agent de police avec un air d’énervement.
  • Bonsoir monsieur l’agent. Que puis-je pour vous ?
  • Il fait quelle heure maintenant ?
  • Il est 22 heures.
  • Ne sais-tu pas que le couvre-feu commence à 21 h ?
  • Si, mais j’ai dû l’oublier aujourd’hui en raison de mes nombreuses courses de la journée.
  • Monsieur, veuillez descendre ! Le chef voudrait vous parler.

Bina ouvre le portuaire de son Rav4 et descend. En sortant, il prend sur lui les papiers du véhicule au cas où on les lui demanderait.

Mais hélas, il n’avait rien compris des intentions de ces hommes. Une fois à quelques mètres de son véhicule, il se voit entouré par ces hommes en uniforme comme si on venait d’attraper un voleur.

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  • Monsieur, lui dit un d’entre eux, voilà la punition que nous réservons ici aux personnes indifférentes des décisions du gouvernement. Tu vas chanter et danser.
  • Je vous en prie. Je ne sais ni chanter ni danser. Dites-moi ce que vous voulez. D’ailleurs, certains de vos collègues viennent de m’arrêter en ville.
  • Ce que nous voulons, c’est que tu chantes et danses. Ceux-ci étaient nos collègues, pas nous. Nous ne sommes pas du même quartier et d’ailleurs qu’est-ce qui nous prouve que tu dis vrai.

À ces mots, Bina reçoit un premier coup de fouet accompagné du mot « Chante et danse », puis un second coup ensuite un troisième.

N’ayant plus d’autres choix, le jeune commerçant se met à improviser une chanson sur l’indifférence au couvre-feu en l’air du coronavirus. Il improvise également des pas de danse pendant qu’il se fait filmer par un autre agent. Pendant ce temps, tous les hommes en uniforme étaient ivres de joie.

Après juste quelques pas de danse, ils le libèrent. Bina rejoigne son véhicule. Il regagne à vive allure son domicile. Cette fois-ci, il s’en fout qu’il rencontre d’autres ou pas. Déjà toute la journée a été noire pour lui. Mais c’est le fruit de l’indifférence.

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Cette situation a profondément bouleversé le commerce du jeune homme qui avait maintenant le dégoût même de la vie. Mais il n’est pas seul dans cette situation. D’autres vivent pires.

À suivre !

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