L’annonce a provoqué une onde de choc diplomatique de part et d’autre de l’Atlantique. Mercredi 30 décembre 2025, les gouvernements du Mali et du Burkina Faso ont réagi avec fermeté à la décision de l’administration Trump d’étendre l’interdiction d’entrée sur le territoire américain à de nouveaux pays africains, invoquant des motifs sécuritaires.
Selon un communiqué de la Maison Blanche, les nouvelles restrictions, qui entreront en vigueur le 1er janvier 2026, visent à « protéger la sécurité des États-Unis ». Elles frappent désormais les ressortissants de cinq pays supplémentaires : le Mali, le Burkina Faso, le Niger, le Soudan du Sud et la Syrie, ainsi que les voyageurs munis de documents délivrés par l’Autorité palestinienne.
Les autorités américaines justifient cette mesure par les « failles dans les systèmes de vérification à l’étranger », la corruption, le manque de coopération en matière de réadmission des ressortissants expulsés, et la présence de groupes terroristes actifs dans certaines zones.
Washington a également étendu les restrictions existantes à la Sierra Leone et au Laos, et imposé des limitations partielles à une quinzaine d’autres pays africains, dont le Nigeria, la Tanzanie et le Zimbabwe.
Les États du Sahel dénoncent une décision « unilatérale »
À Bamako, le ministère malien des Affaires étrangères et de la Coopération internationale a immédiatement publié un communiqué cinglant. Le gouvernement « prend acte » de la décision américaine mais « regrette qu’une décision d’une telle importance ait été prise sans la moindre concertation préalable ». Le texte déplore « un motif sécuritaire en contradiction avec les réalités du terrain », laissant entendre que les justifications avancées par Washington relèvent davantage de considérations politiques.
Dans la foulée, le Mali a annoncé l’application du principe de réciprocité : les ressortissants américains seront désormais soumis aux mêmes conditions et exigences que celles imposées aux citoyens maliens souhaitant se rendre aux États-Unis. Le communiqué réaffirme néanmoins « l’attachement du Mali à des relations internationales fondées sur le respect mutuel et la souveraineté nationale ».
Ouagadougou sur la même ligne
À Ouagadougou, la réponse du gouvernement burkinabé est quasi identique. Le ministère burkinabé des Affaires étrangères, de la Coopération régionale et des Burkinabè de l’extérieur, dirigé par Karamoko Jean Marie Traoré, a dénoncé une décision « prise unilatéralement », tout en annonçant l’entrée en vigueur immédiate de mesures équivalentes en matière de visas pour les citoyens américains.
Le communiqué conclut en rappelant l’attachement du Burkina Faso au « respect mutuel, à l’égalité souveraine des États et au principe de réciprocité », avant de réaffirmer sa devise nationale : « La Patrie ou la Mort, nous vaincrons. »
Une escalade symbolique aux relents de guerre froide
Si Washington présente cette nouvelle extension du travel ban comme un instrument de sécurité nationale, de nombreux observateurs y voient une démonstration de force politique visant à rassurer l’électorat trumpiste sur le thème récurrent de la fermeté migratoire. L’administration américaine justifie également cette mesure par l’arrestation récente d’un ressortissant afghan suspecté d’avoir tiré sur deux soldats de la Garde nationale lors du week-end de Thanksgiving, un incident immédiatement brandi par la Maison Blanche comme preuve de la nécessité de renforcer les contrôles.
Mais dans les capitales africaines concernées, la lecture est toute autre : Bamako et Ouagadougou dénoncent une politique discriminatoire et contre-productive, susceptible de fragiliser davantage les relations entre les États-Unis et les pays du Sahel, déjà éprouvés par les crises sécuritaires et économiques.
Un précédent lourd de conséquences
Ce nouvel épisode marque la troisième extension du travel ban depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, en janvier 2025.
Les diplomaties africaines, tout en affichant leur attachement à la souveraineté et à la réciprocité, s’inquiètent des répercussions humanitaires et économiques de ces mesures sur leurs diasporas et leurs relations bilatérales.
À Bamako comme à Ouagadougou, la riposte se veut mesurée mais ferme. Il s’agit d’un rappel adressé à Washington que le temps des décisions unilatérales sans conséquence est révolu.
A.D
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