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Umaro Sissoco Embalo : « Ce ne sont pas des petits fonctionnaires qui vont venir nous dicter ce qu’on doit faire »

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Dans une interview accordée le mercredi 5 mars 2025 à For You MEDIA AFRICA, Umaro Sissoco Embalo, le président de la Guinée-Bissau, a exprimé une critique sévère à l’encontre de la Commission de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), en particulier à propos de ses récentes actions dans son pays. Le président Embalo n’a pas hésité à souligner « les erreurs de la CEDEAO », tout en réaffirmant son engagement pour un respect absolu de la loi et des principes qui régissent son pays.

Selon le président Embalo, la Commission de la CEDEAO a commis une « très grande erreur » en agissant en contradiction avec les principes de souveraineté nationale. Dans une déclaration sans ambiguïté, il a insisté sur le fait qu’un pays souverain ne peut pas être soumis à des diktats extérieurs, même de la part d’une organisation à laquelle il appartient. « On ne peut pas avoir une feuille de route et violer cette dernière », a-t-il affirmé. Pour lui, les décisions au sein de la CEDEAO doivent être prises par les chefs d’État, et non par des fonctionnaires non élus qui ne sont pas responsables devant les populations des États membres.

Le président bissau-guinéen s’est rappelé des circonstances entourant l’envoi de la mission en Guinée-Bissau. « Lors de notre sommet, il a été décidé d’envoyer une mission de la CEDEAO pour observer la situation dans le pays, et c’est normal », a expliqué Embalo. Toutefois, il a précisé qu’il avait donné son accord sous une condition fondamentale : « le respect de la loi et de la Constitution de la Guinée-Bissau ». En conséquence, lorsqu’il a estimé que cette condition n’avait pas été respectée, il n’a pas hésité à renvoyer les observateurs de la CEDEAO, affirmant que la Constitution de son pays devait primer sur toute intervention extérieure.

Un refus catégorique de toute sanction

Concernant d’éventuelles sanctions de la CEDEAO contre la Guinée-Bissau, le président Embalo a exprimé une confiance totale en la souveraineté de son pays. Il a affirmé qu’il n’avait « aucune crainte » de sanctions, soulignant que celles-ci n’étaient « ni possibles, ni envisageables ». Il a réaffirmé que tout ce qu’il faisait, était en accord avec les principes de la CEDEAO, et a insisté sur le fait que la Guinée-Bissau, en tant que pays membre fondateur, avait toute légitimité à prendre ses propres décisions.

 « La CEDEAO, c’est nous, les chefs d’État, ce ne sont pas des petits fonctionnaires qui vont venir nous dicter ce qu’on doit faire », a-t-il martelé, dans une déclaration ferme qui reflète sa position de résistance face à toute forme d’ingérence.

Le président a aussi rappelé que la souveraineté des États membres est primordiale et qu’aucune institution internationale, pas même les Nations Unies, ne saurait imposer une décision contre la volonté des pays concernés. Il a ajouté que les décisions au sein de la CEDEAO devaient être prises en collégialité, au niveau des chefs d’État et de gouvernement, et non par une commission détachée de la réalité politique et des impératifs locaux.

La CEDEAO face à une crise de leadership

Embalo n’a pas seulement critiqué les actions récentes de la Commission de la CEDEAO. Il a également abordé les difficultés internes que traverse l’organisation régionale. Selon lui, l’absence de respect des limites des pouvoirs au sein de la CEDEAO a conduit à une crise de leadership et à l’aliénation de certains membres importants, notamment le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Ces pays ont récemment quitté l’organisation, une décision que le président bissau-guinéen considère comme « vraiment dommage ». Mais, malgré cette situation, il reste optimiste sur la possibilité de renouer des liens avec ces nations et d’éviter une fracture irréparable au sein de l’union régionale.

Il a souligné que ces pays n’auraient peut-être pas quitté la CEDEAO si l’organisation avait su mieux gérer les crises au Mali, au Burkina Faso et au Niger. « C’est vraiment dommage qu’ils soient partis, mais je pense qu’on peut encore les retrouver », a déclaré Embalo. Toutefois, il reconnaît que la création de la Confédération des États du Sahel (AES) pourrait compliquer cette réconciliation.

Un appel à une réforme de la CEDEAO

Dans son intervention, Embalo a exprimé une volonté de réformer profondément la CEDEAO. Il a critiqué la présence d’« activistes » au sein de la Commission, soulignant que cela était « inacceptable ». Pour lui, l’organisation doit être « totalement refondée ». Il a expliqué que la CEDEAO, malgré son histoire et son rôle fondamental dans la sous-région, est aujourd’hui en train de s’effondrer sous le poids de ses propres contradictions et d’une gestion inefficace.

Il a conclu son intervention en appelant à une révision des approches de la CEDEAO face aux crises politiques en Afrique de l’Ouest, notamment en ce qui concerne l’intervention militaire au Niger. Selon Embalo, l’annonce de cette intervention était une erreur stratégique, et l’organisation aurait dû envisager d’autres solutions. Mais, au lieu de se laisser piéger par les erreurs du passé, il a exhorté les dirigeants de la CEDEAO à regarder vers l’avenir pour restaurer la crédibilité de l’organisation. « Il faut aller de l’avant pour sauver la CEDEAO », a-t-il affirmé.

L’interview du président Umaro Sissoco Embalo illustre la position de plus en plus tranchée de la Guinée-Bissau vis-à-vis de la CEDEAO et met en lumière les tensions croissantes au sein de l’organisation régionale. 

Ibrahim Kalifa Djitteye 


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