Au sein de la vibrante campagne présidentielle sénégalaise, Ousmane Sonko réoriente le débat sur la souveraineté monétaire, proposant une rupture audacieuse avec le franc CFA. Cette initiative résonne à travers le Sahel, esquissant une nouvelle carte économique et politique régionale.
Au cœur de la campagne présidentielle au Sénégal, la proposition de réforme monétaire, au coeur du programme politique de la coalition Diomaye, paru le 9 mars dernier, a soulevé des vagues bien au-delà des frontières sénégalaises. L’idée de se doter d’une monnaie propre, évoquée par Ousmane Sonko, résonne comme un écho de l’aspiration à une plus grande souveraineté économique et monétaire en Afrique, en particulier dans la région du Sahel.
Sonko dans la mouvance de l’AES
Lors d’une conférence de presse, le 15 mars, Sonko a tenu à préciser sa position concernant le franc CFA, après s’être exprimé en wolof, choisissant le français pour adresser un message clair à la communauté internationale. Cette démarche souligne la complexité et la sensibilité du sujet, marquant une volonté de se distancer tout en nuancant sa critique du franc CFA, héritage colonial devenu symbole de dépendance économique pour certains pays africains.
La réforme du franc CFA n’est pas nouvelle dans l’agenda politique de Sonko. Déjà en 2019, lors de la campagne pour la présidentielle de février, il avait fait de cette réforme un point central, envisageant un passage à l’Eco annoncé à Abidjan comme une « grande victoire pour les jeunesses africaines« . Cette position radicale envers le franc CFA illustre une rupture souhaitée avec les anciens modèles économiques et une quête de redéfinition des relations, notamment avec la France.
La dynamique sénégalaise s’inscrit dans un mouvement plus large au Sahel. Le Mali, le Burkina Faso, et le Niger ont exprimé leur volonté de créer une monnaie commune sous l’égide de l’Alliance des États du Sahel (AES), fondée le 16 septembre 2023 à Bamako. Cette initiative pourrait redéfinir les équilibres économiques et politiques dans la région, mettant potentiellement en tension les relations avec des institutions telles que la CEDEAO et l’UEMOA, qui incarnent l’ordre économique régional actuel.
Volonté de repenser l’ordre économique
L’élection de Sonko pourrait marquer un tournant décisif pour l’élargissement de l’AES et pour l’avenir monétaire du Sahel. Sa vision, bien que radicale, pourrait incarner un désir de renouveau et d’indépendance économique. Toutefois, elle soulève des questions quant à la viabilité et aux conséquences d’une telle réforme sur l’économie locale et les relations internationales.
La proposition de Sonko et la réaction des pays du Sahel témoignent d’une volonté de repenser l’ordre économique et monétaire régional. Ce débat, qui dépasse les frontières nationales, pourrait influencer l’avenir économique de toute la région. La réussite d’une telle entreprise nécessitera cependant une approche équilibrée, tenant compte des enjeux économiques, politiques et sociaux, afin de garantir la stabilité régionale et de favoriser le développement durable.
Chiencoro Diarra
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