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Sénégal : la Cour suprême confirme la condamnation du Premier ministre Ousmane Sonko

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 La démocratie sénégalaise, souvent saluée comme modèle en Afrique de l’ouest, entre de nouveau dans une véritable zone de turbulence. La Cour suprême a confirmé, le mardi 1er juillet 2025, la condamnation du Premier ministre Ousmane Sonko pour diffamation. Une décision rare pour un dignitaire en fonction. Cette affaire, qui maintient une peine de prison avec sursis et la déchéance de ses droits civiques, relance le débat sur l’indépendance de la justice et la résilience des institutions sénégalaises. La contre-attaque de Sonko, qui demande une révision de son procès, soulève des questions et met à l’épreuve l’équilibre des pouvoirs dans le pays.

La confirmation de la peine contre Ousmane Sonko est un événement rare sur le continent. Alors qu’il occupe désormais le poste de numéro trois de la République, le Premier ministre se voit imposer les conséquences d’un jugement prononcé alors qu’il était encore dans l’opposition. Il écope six mois de prison avec sursis, 200 millions de F CFA de dommages et intérêts, et surtout, la déchéance de ses droits civiques. Cette dernière clause l’avait déjà écarté de la course à la dernière présidentielle.

Ce verdict, validé en appel par les plus hautes instances judiciaires, est perçu par beaucoup comme un témoignage de la solidité des institutions sénégalaises. Dans une région où l’impunité des dirigeants est parfois la norme, le Sénégal semble tracer une voie différente. Ce n’est pas la première fois que la justice sénégalaise fait preuve d’une telle fermeté. En 2024 déjà, elle avait joué un rôle crucial en mettant fin aux tentatives de l’ancien chef de l’État, Macky Sall, de s’accrocher au pouvoir. La confirmation de la condamnation de Sonko, loin d’être un acte isolé, renforce l’idée qu’au Sénégal, les institutions sont suffisamment fortes pour que nul ne puisse se soustraire à la Justice, fût-il un haut dignitaire. Le droit est la seule boussole.

La contre-offensive du Premier ministre, justice ou calcul politique ?

La réaction d’Ousmane Sonko à ce revers judiciaire n’a pas tardé. Loin de s’incliner, il a immédiatement déposé une demande de révision de son procès auprès du ministère de la Justice. Il promet d’y apporter des preuves qu’il affirme déterminantes, notamment le fameux document de l’Inspection Générale des Finances (IGF), qu’il invoquait pour justifier ses accusations de malversations financières à l’encontre de Mame Mbaye Niang dans le cadre du Programme des Domaines Agricoles Communautaires (PRODAC).

Bien que la loi sénégalaise offre cette voie de recours, cette initiative du Premier ministre suscite de vives interrogations sur ses réelles motivations. Pour de nombreux observateurs, cette démarche vise avant tout à donner une coloration politique à l’affaire. L’idée serait de transférer le dossier à de nouveaux magistrats, potentiellement nommés par le pouvoir en place, dans l’espoir d’obtenir un revirement de situation. Cette perception est renforcée par le fait que Sonko demande également la révision de l’affaire de viol pour laquelle il avait également été condamné.

Cette stratégie interroge la cohérence du discours sur l’État de droit. Si Ousmane Sonko cherchait véritablement à prouver son attachement à une justice impartiale, n’aurait-il pas dû, selon ses critiques, se plier au verdict de la Cour suprême, d’autant plus que ce sont ses propres avocats qui avaient initialement interjeté appel ? La question est simple et cinglante : qu’aurait-il fait si la décision de la Cour avait été en sa faveur ? Il est probable qu’il l’aurait célébrée comme une victoire de la justice, tandis que la partie plaignante aurait dénoncé un scandale. Cette divergence d’appréciation est un classique des décisions de justice, toujours perçues différemment selon les intérêts des parties en conflit.

Les enjeux d’une démocratie en pleine évolution

L’affaire Sonko dépasse largement le cadre d’un simple litige judiciaire. Elle met à l’épreuve la maturité démocratique du Sénégal. Elle soulève des questions fondamentales sur la véritable séparation des pouvoirs et la capacité du pays à maintenir la confiance de ses citoyens envers son système judiciaire. La façon dont ce dossier sera géré dans les prochains mois aura des répercussions bien au-delà des frontières sénégalaises.

Le Sénégal est confronté à un immense défi. Il doit garantir que la justice reste impartiale, même lorsque le Premier ministre est impliqué, tout en naviguant dans un paysage politique complexe. Le pays se trouve à un tournant crucial. C’est une réelle opportunité pour le Sénégal de réaffirmer son statut de modèle en Afrique. Il peut prouver que même face aux plus grands enjeux de pouvoir, le droit demeure et doit rester la seule boussole.

Ibrahim Kalifa Djitteye 


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