Depuis quelques années, le Mali est en train de se doter d’outils efficaces pour lutter contre l’enrichissement illicite à col blanc. C’est dans ce cadre qu’il a initié des réformes judiciaires telles que la création de l’Agence de Recouvrement et de Gestion des Avoirs saisis ou confisqués (ARGASC). Pour se doter de bons outils de travail, celle-ci a organisé un atelier regroupant tous les acteurs de la chaîne pénale.
Il s’agit de l’atelier de validation des outils de recouvrement et de gestion des avoirs saisis ou confisqués et de réflexion sur la mise en œuvre de la confiscation sans condamnation pénale. C’était du 13 au 14 mai 2025 à Bamako. Il a été organisé avec l’appui du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) à travers le projet LUCCEI II et a réuni une trentaine d’acteurs clés de la chaîne pénale venus des pôles économiques et financiers, de la Cour d’appel de Bamako, de la Cour suprême et d’autres structures judiciaires.
Pour le Directeur général de l’ARGASC, le magistrat Oumar Traoré, l’objectif est non seulement de valider les outils de travail élaborés par l’agence, mais aussi de réfléchir collectivement à la mise en œuvre concrète de la confiscation sans condamnation, en lien avec les magistrats, les services d’enquête et les juridictions concernées. Pour sa part, le représentant du ministère de la Justice et des Droits de l’Homme, Daouda Sissoko, a rappelé que la récente réforme du Code pénal, en son article 131-9, introduit la possibilité de procéder à la confiscation des biens en l’absence de condamnation pénale, une avancée majeure dans la lutte contre l’impunité financière.
Confiscation de biens sans condamnation pénale
L’article 131-9 du Code pénal est clair en la matière. Il dispose :
« […] La confiscation en l’absence de condamnation pénale est ordonnée à la requête du ministère public, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, lorsque l’auteur de l’infraction ne peut être poursuivi pour cause de décès, de fuite ou d’absence ou dans d’autres cas appropriés tels que lorsque le bien à confisquer est périssable, lorsqu’il a été abandonné par le propriétaire, lorsque sa conservation coûterait plus cher que le bien lui-même, lorsque sa conservation est dangereuse pour la santé ou la sécurité publiques et lorsqu’il va perdre de sa valeur avec le temps. Dans ces cas, le ministère public démontre que le bien constitue le produit ou l’instrument d’une infraction ou que le comportement délictueux est établi en appliquant le critère de la probabilité la plus forte, qui signifie que les avoirs peuvent être obtenus même lorsque les éléments de preuve ne sont pas suffisants pour obtenir une condamnation pénale. »
L’ARGASC, une réforme majeure
La création de l’Agence de Recouvrement et de Gestion des Avoirs saisis ou confisqués (ARGASC) marque la volonté ferme des autorités de la transition de lutter farouchement contre l’enrichissement illicite. Le temps où les auteurs d’infractions financières purgent leurs peines et jouissent en même temps des avoirs acquis illicitement.
Créée en 2022, sur initiative du ministre de la Justice, elle a pour mission le recouvrement et la gestion des avoirs saisis ou confisqués dans le cadre des procédures pénales relatives à la délinquance économique et financière. A ce titre, elle est chargée : d’exécuter, au nom du parquet, les jugements et arrêts emportant confiscation spéciale des avoirs, y compris les amendes et les dommages et intérêts au profit du Trésor public ; de gérer les avoirs gelés, saisis ou confisqués qui nécessitent, pour leur conservation ou leur valorisation, des actes de gestion ; de gérer les avoirs qui lui sont confiés par les services de l’État ; de centraliser en lien avec le trésor public les avoirs gelés, saisis ou confisqués ; d’aliéner ou de détruire les biens périssables ou ne pouvant pas être conservés, saisis ou confisqués, en lien avec les services des domaines et en rapport avec les autorités judiciaires compétentes.
Elle est appelée aussi à constituer une banque de données sur les avoirs gelés, saisis ou confisqués ; à collaborer avec les services similaires des pays étrangers en matière d’entraide et de coopération judiciaire internationale ; à fournir des renseignements sur les avoirs gelés, saisis ou confisqués dans le cadre de l’entraide policière ; à renforcer la surveillance des avoirs gelés, saisis ou confisqués jusqu’à la fin des procédures. Aussi, doit-elle participer à l’élaboration de la règlementation en matière pénale sur le gel, la saisie ou la confiscation des avoirs.
Son budget prévisionnel pour l’exercice 2025 est équilibré en recettes et en dépenses à hauteur de 329 248 000 francs CFA.
Sidi Modibo Coulibaly
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