L’arrestation de plusieurs hauts responsables d’Écobank Mali et la fronde du SYNABEF plongent le secteur bancaire dans une crise inédite, menaçant la stabilité financière au moment où le gouvernement mise sur la relance économique.
Le thermomètre du climat des affaires au Mali vient de chuter brutalement. En plaçant sous mandat de dépôt plusieurs hauts responsables d’Écobank Mali, la justice malienne a lancé un pavé dans la mare du secteur bancaire, avec des éclaboussures qui risquent de tacher durablement l’image de l’une des institutions financières les plus influentes du pays. Faux et usage de faux, blanchiment de capitaux, complicité… les chefs d’accusation égrenés par le Pôle économique et financier de Bamako ont de quoi inquiéter. D’autant plus qu’à la barre, ce ne sont pas seulement des cadres de la banque qui comparaissent, mais aussi des promoteurs indiens et des chefs de projet, dans une affaire où se mêlent opérations financières douteuses et messages Swift litigieux.
Transformer les espoirs en mirage
Le SYNABEF (Syndicat National des Banques, Assurances, Établissements Financiers, Microfinances et Commerces du Mali) n’a pas tardé à réagir. Son communiqué du 8 mars 2025, au ton alarmiste, laisse entrevoir une situation potentiellement explosive. Non content de dénoncer les mises en détention, le syndicat a décidé de frapper fort : un sit-in est prévu devant toutes les banques du pays du 10 au 12 mars, avec en prime un gel immédiat des transferts de garanties des entreprises publiques et parapubliques, dont l’incontournable Énergie du Mali (EDM.SA). Une paralysie financière en perspective, qui ne pouvait survenir à un pire moment.
Car voilà que cette tempête bancaire s’abat alors que le gouvernement malien joue une partie décisive sur le front économique. L’Exécutif de Bamako s’est fixé un cap : relancer les usines à l’arrêt, donner un second souffle au secteur minier, accélérer la reconstruction des infrastructures. En un mot, donner un nouveau souffle à l’économie malienne. Une ambition qui, pour se concrétiser, a besoin d’un système bancaire fiable et d’un climat d’investissement apaisé. Or, la crise qui couve autour d’Écobank pourrait bien transformer ces espoirs en mirage, si elle venait à ébranler la confiance des acteurs économiques et financiers.
L’attentisme, l’erreur fatale à éviter
Dès lors, une question brûle les lèvres : qui pilote ? Si les autorités monétaires et le ministère des Finances n’apportent pas rapidement des clarifications sur cette affaire, la psychose pourrait gagner l’ensemble du secteur. L’attentisme serait une erreur fatale. La Banque Centrale doit prendre position, établir les responsabilités et rassurer tant les employés que les clients et partenaires financiers. Car au-delà du cas spécifique d’Écobank, c’est toute la gouvernance bancaire qui est en jeu.
L’heure est donc à la transparence. Il en va non seulement de la crédibilité de l’institution judiciaire, mais aussi de la stabilité d’un secteur bancaire qui, depuis des décennies, joue un rôle de premier plan dans le développement du pays. Il appartient aux pouvoirs publics de restaurer la confiance sans céder ni à la panique, ni à la complaisance. Car si le feu n’est pas vite maîtrisé, la crise d’Écobank pourrait bien embraser l’ensemble du système financier malien. Et quand les banques s’enrhument, c’est toute l’économie qui tousse.
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