Au Mali, le mois de ramadan ne dissuade pas certains musulmans à fréquenter des bars, des boites de nuit ainsi que d’autres endroits considérés comme non orthodoxes dans la religion musulmane. À Bamako, les boutiques d’alcool et les bars font des revenus durant cette période grâce à cette fréquentation au compte-goutte.
Le soleil se couche à Bamako. Sur les ondes des radios locales, la cloche vient de sonner, annonçant la rupture de jeûne du jour. La majorité des fidèles musulmans rejoignent les mosquées ou leurs maisons, après une journée harassante, sous un soleil de plomb. Au même moment, quelques-uns se dirigent vers les bars, buvettes et autres lieux de retraite, à la recherche d’une goutte d’alcool. Juste une petite goûte afin de taire une soif dont seul l’alcool peut calmer.
« Il est difficile d’abandonner. Moi je bois depuis des années. Pendant le ramadan, j’observe le jeûne. Après la rupture, la nuit, je prends ma dose pour me sentir en forme », confesse M. Tall, un agent commercial.
Assis dans un recoin d’une boutique d’alcool à Moribabougou, bien camouflé, un client avoue : « Ce n’est pas facile d’abandonner tout d’un coup. Je bois depuis presque vingt ans maintenant ».
Les rues princesse de l’Hippodrome et de Badalabougou
Selon les indiscrétions dans des boites de nuit de la capitale malienne, « les hommes d’affaires, les opérateurs économiques…, rattrapent le temps perdu pendant la nuit. Des rendez sont fixés dans les lieux habituels ». Certains n’hésitent pas à reprendre la bouteille. « Entre boisson sucrée et boisson alcoolisée, le choix est vite fait qu’on soit amateur ou habitué de la dernière », précise-t-on.
Après la rupture et la prière, quelques noctambules se laissent guider par leur flair, à la recherche d’un endroit animé. Parmi les endroits les plus fréquentés pendant le jeûne musulman figurent les rues princesse de l’Hippodrome et de Badalabougou. Dans ces endroits, les usagers ne viennent pas uniquement pour prendre un verre, mais aussi pour traiter affaires, ou encore apprécier le défilé de quelques belles demoiselles de la nuit.
Le blues des professionnelles du sexe
Le Mali est un pays à majorité musulmane (plus de 90 %). Le caractère laïc du pays offre à chaque citoyen le droit de jouir de ses passe-temps dans la légalité. Mais aujourd’hui, selon nos constats dans certains bars de Bamako et buvettes de Bamako, beaucoup des buveurs qui envahissent ces endroits, la nuit, sont des pratiquants de la religion musulmane.
Dans cette boutique d’alcool, située en face de la RN27 à Moribabougou, les fêtards viennent depuis le coucher du soleil jusqu’à 4 heures du matin. Certes, l’afflux n’est pas comme avant le ramadan, mais les bouteilles d’alcool ne sont pas pour autant abandonnées. « La fréquentation n’est pas comme avant le ramadan, mais dire qu’on ferme les portes pendant le mois sacré est faux. Les gens viennent chaque soir. On peut gagner 50 000 par nuit au maximum et 30 000 au minimum », confie le vendeur d’alcool, sous couvert d’anonymat, à Moribabougou.
Ce gérant d’un autre bar à Quinzambougou confirme la baisse des revenus durant le ramadan. La consommation de l’alcool baisse durant le mois sacré des musulmans. « Je vends à peine le cinquième de ma provision pendant le mois de ramadan. Devant les maisons closes, l’affluence est aussi de moins en moins faible. »
Du côté des professionnelles du sexe, le constat reste de même. « Avec le mois de ramadan, nous avons peu de clients. On se demande si on pourra payer la maison à la fin de ce mois », explique une professionnelle du sexe.
Les nouvelles lois de la République
La fréquentation des bars et d’autres lieux de vente d’alcool par des fidèles musulmans n’est nullement recommandée. « Le ramadan ne se limite pas au jour. Il y a aussi la nuit », a lancé un prêcheur.
Les bars étaient interdits au Mali, dans les années 1980 sous le régime militaire de Moussa Traoré. Le gouvernement exigeait la fermeture des bars et maisons closes durant le mois de ramadan. Mais avec l’avènement de la démocratie, cette règlementation a été vite levée au profit des nouvelles lois de la république.
Dans le passé, les villes maliennes étaient inertes pendant le mois de ramadan. Aujourd’hui, les gens ont tendance à reprendre les activités après la rupture du jeûne.
Mohamed Camara
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