Home ChroniquesBillet d'humeur Mali : Sur la colline du savoir, la violence frappe à la porte de l’avenir

Mali : Sur la colline du savoir, la violence frappe à la porte de l’avenir

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La colline du savoir devrait être un lieu de hautes aspirations, où l’esprit est nourri et l’avenir forgé dans les flammes de l’éducation et du débat intellectuel. Mais ce tableau idyllique a été souillé par la violence brute, par des poings qui parlent plus fort que les mots, par des couteaux qui tracent des lignes irréversibles entre la vie et la mort.

Le 28 février 2024, sur ce lieu jadis tranquille, des rêves se sont brisés sous le coup de la violence. Un décès et plusieurs blessés graves — voilà le bilan macabre d’une lutte de pouvoir estudiantine qui a dégénéré en une barbarie incontrôlable. Le Secrétaire général de l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM), Siriman Seydou Niaré, est devenu le symbole d’une lutte qui ne devrait pas avoir sa place dans les enceintes du savoir.

Les mots du ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique résonnent comme un écho d’indignation dans un amphithéâtre vide. Condamnables, oui, ces actions le sont assurément. Mais les mots sont de faibles boucliers contre la brutalité. Ils ne réparent pas les corps brisés, ne recousent pas les cœurs déchirés par la perte d’un proche, ne ramènent pas les âmes égarées de retour aux sentiers de l’innocence.

Interrogeons-nous 

La suspension des activités de l’AEEM dans l’espace universitaire est une mesure réactive, une tentative de cautériser une plaie béante avec un pansement temporaire. Mais qu’en est-il de la guérison à long terme ? Qu’en est-il de l’engagement à cultiver un terrain où l’éducation et le respect mutuel sont les seules forces qui règnent ?

Cet incident, loin d’être une anomalie, est un symptôme alarmant. Il met en lumière les rivalités et les luttes de pouvoir qui rongent le noyau même de notre future élite. L’université, notre sanctuaire du savoir, semble être devenue un champ de bataille, une arène où les étudiants se transforment en gladiateurs malgré eux.

En tant que nation, en tant que communauté, nous devons nous interroger. Comment en sommes-nous arrivés à un point où le chemin vers la présidence d’un organe estudiantin est pavé non pas de débats et de discours, mais de sang et de douleur ? Comment pouvons-nous espérer que notre pays prospère quand ses futurs leaders apprennent à régler leurs différends par la force plutôt que par l’intelligence ?

Mais au-delà de la justice punitive…

La violence sur la colline du savoir n’est pas seulement un échec pour l’université de Badalabougou, c’est un échec pour toute la nation malienne. C’est un avertissement cruel que si nous ne changeons pas de cap, si nous ne réaffirmons pas notre dévouement à la paix, à la justice et à l’éducation, alors nous risquons de perdre non seulement plus d’étudiants, mais aussi l’âme même de notre futur.

La décision du tribunal de la commune V de placer le Secrétaire général et d’autres de ses camarades sous mandat de dépôt est un début, un pas vers la reconnaissance que de tels actes ne peuvent rester impunis. Mais au-delà de la justice punitive, nous devons chercher une justice réparatrice, celle qui reconstruit, éduque et prévient.

Alors, en ces temps sombres, tournons-nous vers la colline du savoir avec espoir. Espoir que ce lieu redeviendra un havre où les idées et les rêves peuvent fleurir en toute sécurité, et où l’éducation prévaudra sur la terreur. Il est temps de redéfinir ce que signifie être un étudiant, un éducateur, un citoyen malien — pas avec des poings, mais avec des pensées, pas avec de la rage, mais avec de la raison.

Chiencoro Diarra 

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