Aïcha Yatabary est à la fois femme de sciences et de Lettres. De Médecin, spécialiste de santé publique elle en vient à être une littéraire. Éditée et publiée aux Éditions Takaba, l’œuvre Le Banquet des cantatrices est une des dernières parutions d’AÏcha Yatabary, dans le sillage littéraire depuis novembre 2021.
Ces nouvelles regroupées sous le titre de Le Banquet des cantatrices, qui nous plongent dans les coulisses de la féminitude, sont loin d’être hasardeuses. L’auteure, antérieurement, dans son vécu de tous les jours a fait du « combat des femmes » son fer de lance. C’est pourquoi dans le livre l’image sociale de la femme dans toutes ses acceptions dans un pays comme le Mali s’arroge une part prépondérante.
Coépouses et complices
« Coépouses et complices » est la première nouvelle qui ouvre ce récit majeur. Ali Diarra est marié d’abord par endogamie à sa cousine Fatou qui devient sa première épouse. Mais ne tardera pas à se remarier en convolant en justes noces cette fois, avec la femme de son choix Awa. Une belle femme mais aux protocoles alourdis. Si au départ Fatou et sa cadette coépouse semblent bien s’entendre, ce climat de convivialité ne sera qu’une question de temps. Awa, excédante du caractère va bientôt détériorer le foyer Diarra.
Par la suite, Ali — non moins « trop volage mari » — courtise la meilleure amie de sa femme, Hawa. Cette intrigue en sourdine sera ensuite rendue publique parce qu’Ali va finalement se marier avec cette dernière, Férima. Ne serait-ce que pour se venger d’une Awa devenue peut-être très arrogante au domicile des Diarra. C’est la fin entre Ali et son épouse qu’il s’est lui-même choisi. Leurs destins se séparent !
Femme de chance
Dans « Femme de chance », la deuxième nouvelle, Soumaila — moins favorisé par la vie que ses deux autres frères — croise le chemin d’une fille courageuse et courtoise. Bintou va le propulser à la réussite mine de rien. On tenterait même de se laisser emporter par une envolée lyrique à un moment donné de ce récit à en croire au fameux dicton de chez nous : « Derrière un grand homme se trouve toujours une grande femme ».
Soumaila, réussi, oublie d’où il était venu. Commence pour lui à se pavaner çà et là jusqu’au bas qui blesse. Il devient libidineux faisant la cour à toutes même à la petite nièce de sa femme. Dont celle-là reçut la garde depuis fort gamine. Après ce cuisant, la séparation est apparue inéluctable entre les deux amours jadis destinées l’un à l’autre. Soumaila et Bintou viennent à suivre chacun une nouvelle vie. Soumaila revient à sa case de départ — c’est-à-dire à sa situation d’infortuné d’antan. Pendant que Bintou, elle continue à gravir les échelons de la plus belle des manières.
Banquet des cantatrices
Notre troisième et dernière nouvelle « Le banquet des cantatrices », qui prête au livre son titre, relate la vie d’une jeune étudiante en Lettres, Adja. Belle comme une fleur. Chez les Anglais, on l’aurait appelée « hot girl », Adja malmène les hommes à sa trousse. À l’Université des Lettres de Bamako qu’elle fréquente, Adja fait le buzz. Son manège, elle le tient de sa mère, une plus de mondaine.
Au rang de ses nombreux prétendants, elle choisit le plus offrant. Ismaël, un dirigeant d’une société d’Etat, très riche. Mais à la stupéfaction de tous, trois mois après avoir scellé leur hymen, Ismaël tombe drastiquement dans un affreux chômage sans retour. Par la suite il perdra tout. Bien immobilier et autre… le choix de la fringante Adja, motivé par le goût de l’argent, n’aura pas eu une bonne fin. On s’invite encore dans la rechute sociale. L’ex patron de société d’État est contraint de retourner vivre dans sa grande famille et Adja, l’ambitieuse, réduite simplement à enseigner dans un lycée privé.
Séparation et rechute sociale
La mère d’Adja qui rêvait haut pour sa fille est décidément déçue du nouveau coup fustigé par le destin. Adja, au contraire, loin de là, affirme avoir plutôt beaucoup appris de cette vie si pittoresque mais combien passagère. Qui mieux qu’elle aura appris à ses dépens ? l’humilité et la sobriété gouvernent désormais sa vie.
La séparation et la rechute sociale redondent notre texte de bout en bout. Les femmes comme les hommes sont responsables des péripéties qui adviennent dans l’environnement du livre. On ne peut donc parler de partialité de la part de l’auteure. Les responsabilités sont partagées.
Les idées ainsi véhiculées entretiennent du quotidien des familles maliennes à Bamako et en particulier de la femme. Les thèmes comme : amour, caprice, argent, luxe, luxure, ingratitude, superstition, malheur, bonheur, union, séparation, construits autour de l’histoire reflètent de la patente réalité. Le Banquet des cantatrices se traduit comme une mise en garde à la gent féminine dans sa course frénétique au matériel une fois dans le couple.
Mohamed El Moctar TOURE pour Sahel Tribune (collaboration)
L’auteur de cet article est journaliste à Alafia TV, un jeune critique littéraire. Le livre est disponible aux éditions Takaba et dans les librairies à Bamako.
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2 comments
Franchement j’ai vraiment aimé, et puis l’auteur a tout à fait raison sur la société Malienne.
Merci pour le commentaire