Un pas en avant, deux pas en arrière, peut-on dire avec cette démission du gouvernement de transition. Avec elle, ne doit-on pas dire que l’instabilité politique et institutionnelle est devenue l’une des caractéristiques majeures du système démocratique malien ?
Alors que le gouvernement Moctar Ouane amorçait la deuxième moitié du délai imparti, le Premier ministre rend la démission de son gouvernement. Reconduit par le chef de l’État Bah N’Daw, M. Ouane est désormais chargé de former un nouveau gouvernement sur la composition duquel rien n’a encore officiellement filtré. Mais tout laisse croire qu’il s’agit de la volonté de mise en place d’un gouvernement d’ouverture ou d’inclusion qui fera plus état des hommes politiques.
Des rencontres
Depuis la publication du chronogramme des élections en avril dernier, les rencontres se sont multipliées entre le président de la République et des représentants de partis politiques, de la société civile, ainsi que du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), auteur des soulèvements contre le régime IBK. Le président du Comité stratégique du M5-RFP, Choguel Kokalla Maiga demandait entre autres : « la démission du gouvernement », une « rectification de la transition » ainsi que la dissolution du Conseil national de transition (CNT), l’organe législatif.
Outre cela, en début de semaine, des émissaires de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) étaient au Mali pour une mission d’évaluation des « progrès réalisés dans la conduite des affaires de la Nation depuis la mise en place des institutions de la Transition ». À cette occasion, plusieurs acteurs ont été rencontrés.
L’une des recommandations phares de cette mission était évidemment d’« assurer plus d’inclusivité des principaux acteurs sociopolitiques dans le Comité d’Orientation stratégique (COS) afin de parvenir à un consensus sur les choix des réformes prioritaires devant conduire à un processus électoral transparent, crédible et acceptable par tous et ce, dans le délai imparti pour la transition. »
L’inclusion mais pas la stabilité
Cette recommandation d’inclusivité est certes une belle initiative sans pour autant être un signe de stabilité. De 2013 à 2018, combien de remaniements le régime Ibrahim Boubacar Kéïta a initié dans le but d’obtenir l’adhésion des différentes parties prenantes ? Certes les contextes sont différents, mais la volonté de mise en place d’un gouvernement d’union nationale afin de mettre un terme à la crise politique qui existait dans le pays n’a pas réussi à sauver le régime IBK. Au contraire elle a précipité sa chute.
La mise en place d’une nouvelle équipe gouvernementale, alors que le front social est en ébullition avec plusieurs préavis de grève déposés, l’insécurité qui progresse plus au sud avec comme conséquence une recrudescence de la situation humanitaire, etc., pourrait difficilement être une solution rationnelle. Le cas d’IBK devrait servir de leçon. Ce n’est pas le partage de gâteau qui fera mieux avancer la situation sociale et politique. Le système démocratique malien est confronté à un problème d’hommes, de patriotes engagés résolument pour la cause de toute la nation. Une denrée rare que le pays peine encore à trouver.
Sur les traces d’IBK
Cette instabilité institutionnelle favorise difficilement un développement durable et conduit rarement à une accalmie. La formation d’un nouveau gouvernement mettra-t-elle fin au favoritisme qui gangrène cette équipe transitoire avec la nomination des colonels à tous les postes stratégiques ? Cette dissolution du gouvernement Moctar Ouane n’est rien d’autre que « l’éternel recommencement » qui a toujours caractérisé les institutions maliennes. À travers ce premier remaniement ministériel, les autorités de transition marchent dangereusement sur les traces d’IBK et en conséquence il ne faudrait pas s’attendre à grande chose quant aux réformes attendues de cette équipe. Le Mali nouveau est encore loin.
Fousseni Togola
Source: Maliweb.net
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