C’est une réalité indéniable : les manifestants ont pris l’ascendant sur les autorités au pouvoir au Kenya (pays d’Afrique de l’Est). En retirant le projet de budget controversé après des jours de protestations violentes, le président William Ruto a cédé à la pression populaire, démontrant ainsi la puissance de la voix collective.
Le 26 juin 2024, Ruto annonce officiellement le retrait du projet de loi de finances 2024-2025. Un geste qui, bien que salué par certains, arrive après une journée de manifestations qui a couté la vie à au moins 23 personnes. Cette décision n’a pas apaisé tous les esprits, mais elle marque un tournant important : la reconnaissance par le pouvoir en place que les revendications populaires ne peuvent être ignorées.
Les manifestations, déclenchées par l’annonce de hausses de taxes, ont rapidement dégénéré en scènes de violence meurtrière. Des jeunes, principalement de la génération Z, se sont massivement mobilisés pour exprimer leur ras-le-bol face à des mesures fiscales jugées injustes. Le slogan « Occupy Parliament » (occuper le parlement) a résonné dans les rues de Nairobi et d’autres villes du pays, symbolisant une volonté farouche de tenir tête aux décisions gouvernementales.
Face à cette mobilisation sans précédent, les autorités ont déployé des forces de sécurité et même l’armée pour tenter de contenir les manifestants. Mais la répression brutale n’a fait qu’amplifier la détermination de la rue. Des bâtiments saccagés, des affrontements violents, des tirs à balles réelles : le chaos a révélé la profondeur du mécontentement populaire.
Des décisions politiques prises en consultation avec ceux qu’elles affectent le plus
Hanifa Adan, figure emblématique du mouvement de contestation, a qualifié l’annonce du retrait du projet de loi de « coup de com ». Elle n’a pas tort. Si le président Ruto espérait calmer les esprits avec cette décision, il a sous-estimé la colère et la douleur des familles des victimes. Les Kényans réclament des réponses, des actions concrètes et une véritable prise en compte de leurs préoccupations.
Les États-Unis et les Nations unies ont appelé à la retenue et à des enquêtes sur l’usage de la force par la police. Des appels à la justice qui résonnent dans le cœur des manifestants, rappelant que chaque vie perdue mérite d’être honorée par la vérité et la justice.
Le retrait du projet de loi n’est pas une fin en soi. C’est une étape dans un long combat pour la justice sociale et l’équité économique. Les manifestants ont montré que leur voix compte, qu’ils peuvent influencer les décisions politiques. Cette victoire, bien que marquée par la tragédie, est une leçon de résilience et de détermination. Le peuple kényan a parlé, et il est temps que les autorités écoutent vraiment, au-delà des annonces symboliques, pour bâtir un avenir où les décisions politiques sont prises en consultation avec ceux qu’elles affectent le plus.
Chiencoro Diarra
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