Dans la région de Ségou, les coupures intempestives d’électricité stimulent le marché des groupes électrogènes, des panneaux solaires ainsi des power Banks est en plein essor. Les vendeurs de ces outils prisés en période de délestage se frottent les mains. Quant à la population, elle ne lésine pas sur les moyens pour avoir de l’électricité pendant les heures de coupures.
Dans les ruelles plongées dans l’obscurité de Ségou, là où les ampoules se sont éteintes et où les fils électriques semblent tisser des énigmes nocturnes, émerge une lueur d’espoir : celle des vendeurs de groupes électrogènes, qui telles des étoiles dans la nuit, offrent aux habitants un chemin vers la lumière dans les ténèbres du délestage.
Les délestages électriques sont devenus monnaie courante de jour comme de nuit. En cette période, l’électricité est accessible aux personnes ayant les moyens de s’offrir des groupes électrogènes ou ayant certains moyens de bord. Ceux qui ne disposent pas de ces moyens se conforment à la règle de l’EDM S.A.
Un groupe électrogène à cent-cinquante-mille francs CFA
Rappelons qu’à la sortie du ministre de l’Énergie et de l’Eau, Bintou Camara, sur l’ORTM au mois d’octobre 2023, elle s’est expliquée sur le sujet des coupures d’électricité intempestives dans le pays. Elle a expliqué que cela est le résultat d’une mauvaise gestion au niveau de la société, EDM S.A., qui dispose des centrales thermiques pour assurer la fourniture d’électricité. « Les générateurs de ces centrales doivent normalement fonctionner avec du fioul moins coûteux et plus économique. Mais les responsables de la société ont toujours fait fonctionner les générateurs avec du gasoil », a-t-elle fait savoir au peuple malien.
Sur le même problème, son prédécesseur, le ministre Lamine Seydou Traoré s’est vu contraint d’adresser sa lettre de démission pour des raisons de perturbations électriques en mai 2023.
Si ce problème préoccupe autant les administrateurs, cependant, force est de reconnaître qu’il affecte tous les secteurs d’activité de la ville de Ségou. Ce délestage électrique impacte négativement la population.
Les personnes ayant les moyens essaient de trouver un palliatif afin d’atténuer les effets du délestage. Ainsi, plusieurs chefs de famille descendent sur le marché afin de se procurer un groupe électrogène ou une lampe solaire dont le marché est bien fourni en ce moment. « Je suis perdu dans cette situation de coupure incessante que nous vivons depuis un certain temps dans la ville de Ségou. Dans notre quartier, nous pouvons passer des heures voire une journée sans électricité. Lassé de ce délestage chaque jour et nuit, j’ai décidé de payer pour la famille un groupe électrogène. Je viens d’en acheter un à cent-cinquante-mille francs CFA », nous fait savoir Soumana Coulibaly.
L’électricité devenue un luxe
Si ce dernier a pu s’acheter un groupe, Amadou Diarra, père de famille, ne dispose pas des ressources nécessaires pour s’offrir cet engin qui n’est pourtant plus un luxe au Mali. « Je n’ai jamais vu un tel délestage à Ségou, il y a des années de cela. Avec cette allure, je risque de voir ma maladie récidiver puisque je n’ai pas les moyens de m’offrir un groupe électrogène. », craint M. Diarra.
Assise devant une boutique, la tête baissée sur son téléphone, on peut entendre murmurer cette jeune fille, Assitan Coulibaly : « À quand la fin de ce calvaire ? Depuis hier, je n’ai pas réussi à me connecter pour vendre mes articles en ligne. Mon téléphone est aussi presque déchargé. Ah, EDM-Mali. Ayez pitié de nous, Maliens ». « Avec cette coupure, nous sommes presque privés de connexion. Et nous sommes obligés d’acheter des Power Banks pour nos téléphones. », ajouta-t-elle tout en indiquant que l’électricité est devenue un luxe dans ce pays.
Si cette crise dans la fourniture d’électricité écœure des citoyens, il faut noter qu’elle fait le bonheur des vendeurs de groupes électrogènes à Ségou. C’est comme on le dit, à quelque chose malheur est bon.
Des lampes solaires à cinquante-mille francs CFA
Assis dans sa boutique électronique avec un sourire aux lèvres, Monsieur Diaby, avec ses six employés hommes, se frotte bien les mains chaque jour pendant cette coupure de courant. « En ce moment, le marché des panneaux solaires et des groupes électrogènes va bon train. Le prix des groupes varie selon les marques et le volume. Pour les groupes chinois, c’est à partir de soixante-mille francs CFA. Il y a les groupes électrogènes de marque Rato, le gros à partir de cent-quatre-vingt-mille francs CFA, le moyen à cent-dix-mille francs CFA », a-t-il expliqué tout en précisant qu’il peut vendre en moyenne trois à cinq groupes électrogènes, de marques différentes, alors qu’avant c’était même difficile de vendre un seul groupe électrogène par jour.
Le marché est bien garni en groupes électrogènes et de panneaux solaires et certains clients ne lésinent pas sur les moyens de s’offrir ce luxe actuel.
« Avec ce délestage, je peux vendre un gros groupe à deux-cent-mille francs CFA. Pour les panneaux et les lampes solaires, il y a tous les prix. Avec les bonnes lampes solaires, c’est à partir de cinquante-mille francs CFA. Il y en a aussi à seize mille francs. Les panneaux sont accessibles à partir de trente-mille francs CFA », nous explique Adama Traoré, vendeur de pièces électroniques sur la route de l’an 2000 de Ségou.
La recherche des solutions temporaires fait le bonheur de certains
Dans la commune de Pélégana, rencontré devant sa boutique de téléphones et de quincaillerie, Moussa Sissoko déplore la situation que vit actuellement la population, compte tenu des moyens dont disposent les uns et les autres. Nombreux sont ceux qui ne peuvent pas s’offrir des groupes ou des lampes. M. Sissoko se réjouit néanmoins de ses revenus quotidiens. « En tant que citoyen lambda, je regrette ce que nous subissons actuellement. Mais, en ce qui concerne mes marchandises électrogènes, avec ce délestage, mes revenus ont doublé voire tripler avec certains matériels comme les Power Banks, les lampes solaires. Avant, les clients ne les achetaient pas assez. Ils estimaient que c’était cher, mais maintenant, souvent, il y a même des ruptures de stock alors que les prix ont augmenté », a-t-il souligné.
Dans sa boutique, nous croisons Modibo Diallo, un vendeur de supermarchés qui vient d’acheter un nouveau groupe électrogène pour sa boutique et un panneau solaire pour sa famille. « Je suis venu acheter un groupe de 3 kVA à 220 000 francs CFA pour ma boutique afin de limiter les dégâts de la coupure d’électricité, et un panneau solaire à 50 000 francs CFA pour que les enfants puissent apprendre leurs leçons pendant la nuit », explique-t-il avec enthousiasme.
Alors que les habitants de Ségou luttent dans l’obscurité des coupures de courant, une lueur d’espoir se profile à l’horizon pour certains : celle des vendeurs de groupes électrogènes qui prospèrent dans cette période de crise énergétique. Pendant que certains s’efforcent de trouver des solutions temporaires à leurs besoins en électricité, d’autres profitent de cette situation pour faire prospérer leur commerce. Tandis que la ville reste plongée dans l’incertitude quant à une solution à long terme, une chose est sûre : pour certains, les ténèbres sont synonymes de lumière économique.
Fatoumata Z. Coulibaly
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