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De Syrie à Ségou 1 : l’incroyable voyage de Cheick Ousmane Djiré

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Bienvenue dans notre série spéciale consacrée aux grandes familles historiques de Ségou, une ville emblématique du Mali. Située à 240 km de Bamako, Ségou est bien plus qu’une simple localité ; c’est un bastion de traditions, de culture et de spiritualité qui a façonné l’histoire de la région. Au cœur de cette ville, trois familles se distinguent par leur influence religieuse et spirituelle : les Djiré, les Thiero et les Tall. Dans cette série, nous explorons l’héritage de ces familles, leur rôle dans la propagation de l’islam, et leur impact durable sur la communauté de Ségou. Chaque article est dédié à l’une de ces familles, offrant un aperçu détaillé de leur histoire, de leur arrivée à Ségou, et de leur contribution à la société malienne. Plongez avec nous dans l’histoire fascinante des Djiré, Thiero et Tall, et découvrez comment leurs traditions et leurs valeurs continuent de résonner dans le Ségou d’aujourd’hui.

Ségou, située à 240 km de Bamako, est une région riche en histoire et traditions. Cette ancienne capitale de l’empire bamanan est connue pour ses familles religieuses influentes, notamment les Djiré, Thiero, et Tall, qui ont joué des rôles clés aux côtés des rois bamanan. Pour comprendre cette riche histoire, nous avons rencontré Cheick Abdallah Moustapha Djiré, historien et descendant du fondateur de Ségou-Sikoro. Les autres familles ont donné leur accord pour qu’il s’exprime aussi en leur nom.

L’arrivée des Djiré à Ségou

La famille Djiré a été fondée par Cheick Ousmane Djiré en 1697, lorsqu’il a introduit l’islam à Ségou-Sikoro, l’actuelle Ségou. Originaire de Syrie, Cheick Ousmane a quitté sa ville natale pour se consacrer au soufisme, traversant le Sahara et l’Algérie avant de s’établir à Ségou. Son installation a marqué le début de l’influence religieuse de la famille Djiré, qui a toujours été associée à la grande mosquée de Ségou.

Cheick Ousmane Djiré venait d’une famille chérifienne de Chami, l’actuelle Syrie. Lorsqu’il a senti qu’il allait être le futur héritier du trône chérifien, il a décidé de quitter sa ville avec ses disciples pour se consacrer pleinement au soufisme. Son voyage l’a mené à travers le Sahara, l’Algérie et Diré (Tombouctou), où il a passé quatre ans avant de s’établir définitivement à Ségou. Son arrivée et son installation ont marqué le début d’une nouvelle ère pour Ségou-Sikoro, l’actuelle Ségou.

Lieu où s'est installé le premier fondateur de Ségou sikoro, cheick Ousmane djiré
Le lieu où s’est installé le premier fondateur de Ségou sikoro, cheick Ousmane djiré. Fatoumata Coulibaly/ Sahel Tribune

Pour l’histoire, lorsque des personnes venues d’autres horizons demandaient à Cheick Ousmane, déjà installé sur l’actuel « Quai » du festival, d’où il venait, il répondait : « Je viens de Diré », une commune de Tombouctou. Avec le temps et la prononciation rapide, « Ousmane de Diré » devint « Cheick Ousmane Djiré ». Voilà l’origine du nom de famille « Djiré » à Ségou.

Le fondateur, Cheick Ousmane Djiré, s’était installé dans le premier quartier, appelé également « Somonosso », au bord du fleuve Niger. Ce quartier a vu s’installer diverses ethnies venues pratiquer l’islam aux côtés du Chérif Ousmane : les Djiré, Dembélé, Thiero, Sossos, Minta, Thienta, Kané, etc. 

Notre Cheick Ousmane a eu trois fils : Sory Ibrahima Djiré, Oumar Issou Djiré et Bina Daouda Djiré, qui ont tous marqué leur passage à Ségou.

L’importance des Djiré dans l’histoire de Ségou

Cheick Abdallah Moustapha Djiré nous raconte que l’ancien nom de Ségou, « Ségou Sikoro », signifie « Vieux Cheicko sous le Karité ». En effet, devant la maison de Cheick Ousmane se trouvait un tronc de karité, et les habitants de la région utilisaient cet arbre comme point de repère pour localiser le cheick. Au fil du temps, cette référence est devenue « Ségou Sikoro », puis simplement « Ségou ».

La famille Djiré a maintenu son influence en dirigeant les grandes mosquées et prières des fidèles musulmans de Ségou. Les Djiré sont reconnus pour leur rôle religieux et pour avoir aidé à faire de Ségou une ville religieuse bien avant l’arrivée des rois bamanan. Cheick Ousmane Djiré est considéré comme le fondateur de Ségou-Sikoro, et sa famille a conservé une position centrale dans la vie religieuse de la ville.

Selon Cheick Abdallah Moustapha Djiré, l’actuelle Ségou était déjà fondée avant même l’intronisation du premier roi bamanan Biton Mamary Coulibaly en 1712. Le fondateur de Ségou, Cheick Ousmane Djiré, avait établi une base religieuse solide qui a été reconnue et respectée par les rois bamanan. Cette reconnaissance mutuelle entre les rois et les familles religieuses a permis de créer une société harmonieuse où la religion et la royauté coexistaient pacifiquement.

L’héritage des Djiré

La bibliothèque des Djiré, un héritage familial, contient des manuscrits et objets précieux, y compris des écrits de Cheick Ousmane Djiré et El Hadji Oumar Tall. Ces documents sont des trésors pour la recherche culturelle et scientifique, prouvant que l’Afrique n’a pas toujours été une civilisation de l’oralité. La famille Djiré continue de jouer un rôle important à Ségou, perpétuant la tradition de leur ancêtre.

Bibliothèque des Djiré de Ségou
La bibliothèque des Djiré de Ségou. Fatoumata Coulibaly/ Sahel Tribune

Baptisée sous le nom d’Oumarou Kébir Djiré, le troisième imam de Ségou, cette bibliothèque mystique et sacrée abrite des manuscrits et des objets authentiques et précieux des Djiré. Parmi ces trésors, on trouve les manuscrits de Cheick Ousmane Djiré, la canne mystique, les bouillards et chapelets de Sory Ibrahima Djiré, ainsi que la pierre sur laquelle El Hadji Oumar Tall faisait ses ablutions. Ces objets sont non seulement des témoins de l’histoire religieuse de Ségou, mais aussi des preuves tangibles de la riche tradition écrite de la région.

Cheick Abdallah Moustapha Djiré explique que ces manuscrits traitent de nombreux domaines, notamment l’histoire, la grammaire, l’astrologie et l’alphabet en langue bamanankan. Ils constituent des documents de référence pour les études de culture africaine et la recherche scientifique. Ces manuscrits sont conservés avec soin dans la bibliothèque familiale, où ils sont dépoussiérés deux ou trois fois par an et consultés sur place pour éviter toute détérioration.

La tradition veut que ces objets ne soient pas exploités dans des lieux insalubres, touchés avec des mains souillées ou emportés hors de la bibliothèque. Cette rigueur dans la conservation et la consultation des manuscrits et objets mystiques témoigne du profond respect des Djiré pour leur héritage familial et religieux.

La famille Djiré occupe une place centrale dans l’histoire de Ségou. Leur rôle religieux et leur influence se perpétuent à travers les générations, faisant de Ségou une ville religieuse et historique. L’héritage des Djiré, matérialisé par leur bibliothèque et leurs traditions, continue de contribuer à la richesse culturelle de la région. La famille Djiré, par son engagement envers la religion et la préservation de son patrimoine, reste un pilier de la communauté de Ségou.

Fatoumata Z Coulibaly, correspondante à Ségou 

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