Le Syndicat national des assurances, banques et établissements financiers et commerce du Mali (SYNABEF) a tenu une assemblée générale extraordinaire, ce jeudi 13 mars 2025, pour dénoncer l’inculpation de plusieurs employés d’Ecobank-Mali dans l’affaire qui oppose la Société Énergie du Mali (EDM-SA) à l’institution bancaire. Face à la presse, son secrétaire général, Hamadoun Bah, a fermement exprimé son « indignation », annonçant la possibilité d’un préavis de grève.
Deux agents d’Ecobank ont été placés sous mandat de dépôt le 7 mars 2025 par le Pôle économique et financier, dans le cadre d’une enquête sur la transmission de messages SWIFT liés à des garanties financières. Selon le SYNABEF, cette mise en cause repose sur une mauvaise interprétation des faits. Hamadoun Bah a rappelé que la banque s’était contentée de « transférer de bonne foi un message reçu par télex à EDM-SA », sans être en mesure d’en vérifier l’authenticité.
L’affaire concerne des garanties financières liées à un marché public. Pour le syndicat, Ecobank ne peut être tenue responsable des irrégularités constatées, car elle ne détient ni les fonds ni les originaux des documents en question. « Un message SWIFT mentionne les garanties, mais ne remplacera jamais les originaux envoyés par DHL », a insisté Hamadoun Bah, soulignant qu’Ecobank n’a pas connaissance des détails du marché et ne peut donc être impliquée dans une fraude.
Mobilisation syndicale et premières actions
Face à cette situation, le SYNABEF a immédiatement lancé une série d’actions pour protester contre l’arrestation de ses membres. Dès le 6 mars, un sit-in a été organisé devant plusieurs agences bancaires. Le 10 mars, les agents des banques et établissements financiers ont entamé une grève partielle sous forme de sit-ins de deux heures, de 8h à 10h, devant toutes les banques du pays, y compris les bureaux, agences et sièges des institutions financières.
Le syndicat a également décrété l’arrêt immédiat de tout transfert de garanties financières impliquant EDM-SA et d’autres structures publiques et parapubliques jusqu’à nouvel ordre. Cette mesure pourrait avoir des conséquences sur le fonctionnement des finances publiques, particulièrement en cette période de Ramadan, où l’activité économique est généralement plus intense.
Un bras de fer avec la justice
Selon des sources judiciaires, six personnes, dont deux cadres d’Ecobank-Mali, un coordinateur de projet et deux ressortissants indiens impliqués dans des projets énergétiques, ont été placées sous mandat de dépôt. Ils sont soupçonnés d’être impliqués dans la constitution de fausses garanties bancaires, dans le cadre de projets énergétiques liés à EDM-SA. Les accusations incluent « faux et usage de faux », « blanchiment de capitaux » et « complicité », des infractions passibles de lourdes peines.
Cependant, le SYNABEF rejette catégoriquement ces accusations, affirmant que les banquiers n’ont fait que suivre la réglementation bancaire. « Nos camarades n’ont pas fauté. Ils ont simplement transmis des messages SWIFT conformément aux procédures d’Ecobank », a martelé Hamadoun Bah. Le syndicat a également sollicité le soutien de la Direction générale d’Ecobank, du Groupe Ecobank et de l’Association professionnelle des banques et établissements financiers (APBEF), qui ont tous confirmé la conformité des opérations en question.
Un conflit qui pourrait s’enliser
Cette crise pourrait raviver de vieux différends entre l’État et le secteur bancaire malien. Le SYNABEF menace d’intensifier ses actions, allant jusqu’à un arrêt total des activités bancaires si la situation ne se débloque pas rapidement.
Cette situation rappelle une autre crise survenue en 2024, lorsque le placement sous mandat de dépôt du secrétaire général de la section syndicale des banques avait paralysé le secteur bancaire durant une semaine, contraignant la justice à revoir sa position. Après cette grève, plusieurs employés du secteur des hydrocarbures avaient été licenciés, et le SYNABEF souhaite aujourd’hui profiter de cette nouvelle crise pour relancer ces revendications.
Si le bras de fer se poursuit, le Mali pourrait être confronté à une nouvelle crise économique et sociale, à quelques semaines de la fin du Ramadan, une période cruciale pour les transactions financières.
Ibrahim K Djitteye
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