Par un style d’autorité calme et déterminée, Assimi Goïta a façonné une nouvelle grammaire politique malienne. Quatre ans après sa prise de pouvoir, le Mali du 7 juin 2025 n’est plus celui du 7 juin 2021.
Le 7 juin 2025 marque un tournant symbolique dans la trajectoire d’un pays dont le destin est désormais intimement lié à celui de l’homme qui en est devenu le visage : le général Assimi Goïta. Quatre ans après avoir prêté serment dans une atmosphère de tension et d’espérance mêlées, le président de la transition est parvenu à s’imposer comme un pivot central de la réinvention de l’État malien.
Issu des rangs des forces spéciales, forgé dans le feu de la lutte antiterroriste, Goïta ne s’est jamais départi de son flegme militaire. À la tête d’un pays rongé par une décennie d’instabilité, il a opté pour une stratégie que certains qualifient de radicale, d’autres de salutaire : le recentrage. Recentrage sur la souveraineté nationale. Recentrage sur la sécurité intérieure. Recentrage sur la maîtrise du calendrier politique.
Une gouvernance militaire assumée
Depuis sa deuxième prise de pouvoir en mai 2021 – justifiée à l’époque comme une « rectification » de la transition –, Assimi Goïta a consolidé une autorité que peu contesteront aujourd’hui dans les cercles du pouvoir à Bamako. L’alliance initiale avec des figures civiles du M5-RFP, incarnée notamment par la nomination de Choguel Kokalla Maïga au poste de Premier ministre, a permis d’unifier les ailes militaires et civiles du changement. Une union certes pragmatique, parfois houleuse, mais nécessaire.
Sous sa houlette, le gouvernement malien a opéré des ruptures inédites avec son passé immédiat : retrait de la MINUSMA, mise à distance des partenaires historiques, notamment la France, et renforcement des alliances nouvelles avec des puissances alternatives, dont la Russie. Sur le plan interne, la transition a été prorogée pour permettre, selon ses défenseurs, « la restauration effective de l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire ».
Sécurité, souveraineté et solidarité
Dès ses premières déclarations, le président Goïta a martelé que la lutte contre le terrorisme primerait sur toute autre échéance. En cela, il a fait de la sécurisation du pays un préalable non négociable. Des zones naguère abandonnées à la merci des groupes armés ont vu le retour progressif des FAMa, mieux équipées, mieux formées, et surtout portées par une volonté politique affirmée de reconquête.
Sur le plan social, la politique d’œuvres présidentielles – électrification solaire de centres de santé, soutien aux familles de militaires tombés, initiatives communautaires – vient humaniser une gouvernance souvent perçue comme rigide. Le discours officiel se veut sobre, parfois martial, mais toujours ancré dans la volonté de redonner au peuple malien la fierté de sa souveraineté retrouvée.
Une opposition désorientée
Certes, tout n’est pas parfait. L’opposition politique, morcelée et parfois marginalisée par la dissolution des partis, dénonce une concentration du pouvoir. Mais dans les rues de Bamako comme dans les villes de l’intérieur, une partie non négligeable de la population applaudit la fin d’un cycle de promesses non tenues et le retour à un langage de résultats. Le « giga meeting » de juin 2024, rassemblant des milliers de partisans, en est la preuve manifeste.
Assimi Goïta aime à convoquer l’ombre tutélaire de Modibo Keita, figure fondatrice d’un Mali indépendant. Par cette filiation symbolique, il affirme inscrire son action dans le long terme, au-delà des critiques de conjoncture. À ceux qui s’interrogent sur la fin de la transition, il répond par l’action sécuritaire, la stabilisation économique, et le rétablissement d’un État en capacité d’imposer l’ordre et de défendre son territoire.
Quatre ans après le serment du Centre international de conférence de Bamako, le président Goïta ne dirige pas seulement un État en transition. Il incarne, aux yeux de ses soutiens, un Mali debout, souverain, et désormais maître de ses choix. Les défis demeurent – insécurité résiduelle, crise de l’électricité, inflation – mais l’élan populaire reste perceptible. La refondation est en marche. Et pour une frange croissante de la population, l’essentiel est là : ne plus reculer.
Chiencoro Diarra
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