Bocar Harouna Diallo est un jeune chercheur en géographie rurale à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, au Sénégal. Pour une meilleure résolution de la problématique de l’emploi des jeunes en Afrique, le jeune chercheur juge important de coordonner les efforts entre le secteur privé et celui public et aussi avec toutes les bonnes volontés et surtout la diaspora.
Le Sénégal comme bon nombre de pays du sahel est confronté à un problème permanent de l’emploi des jeunes et d’un chômage chronique. Et tous les gouvernements qui se sont succédé ont entrepris des politiques de l’emploi des jeunes pour endiguer le mal, mais sans grand succès. Les États ne sont pas certes les principaux employeurs, mais en ont une part cruciale de responsabilité. Les jeunes diplômés, les femmes et les moins diplômés exerçant dans l’informel sont les principales victimes.
Comprendre le problème structurel de l’emploi des jeunes au Sénégal
Comme on le dit souvent, un problème bien posé est à moitié résolu. Les jeunes sénégalais souffrent d’un manque criard d’opportunités d’emploi malgré toutes les potentialités et les démarches menées par les différents gouvernants. Il me semble que cette persistance du problème d’emploi s’explique par plusieurs raisons. Il s’agit :
- Un manque d’opportunités d’emplois récents. L’État ne crée pas d’emplois, mais peut mettre en place un environnement propice aux emplois. Et il y’a une faible capacité d’absorption du secteur privé et le public recrute moins ;
- Un nombre important de jeunes occupent le marché de l’économie informelle du fait de manque de compétences souvent sollicitées par les entreprises ;
- Un dysfonctionnement du système d’éducation et de formation qui entraine une minime interaction entre l’école et l’entreprise (système productif). Les jeunes souffrent d’un manque de qualification pérenne ;
- Un faible taux de scolarisation avec un abandon élevé. Ce qui entraine une forte proportion d’analphabètes qui s’activent toujours dans l’informel ;
- Un système éducatif avec un privilège accordé à l’enseignement supérieur au détriment de celui professionnel. Le gouvernement actuel a fait des efforts, mais il reste des choses à affiner. Et il serait utile de procéder à une évaluation exhaustive de son programme « école-entreprise » ;
- Une répartition inégale et inéquitable des investissements. Ce qui nous fait avoir deux Sénégal-s (le Sénégal utile qui concerne toute la bande côtière et le Sénégal inutile qui correspond à l’intérieur du pays) ;
- Un mauvais maillage territorial avec des fractures sociales et économiques très visibles.
Il existe autant de causes qui justifient vraiment le problème de l’emploi des jeunes au Sénégal et un peu partout en Afrique. La résolution de ce problème nécessite un effort coordonné entre le secteur privé et celui public et aussi avec toutes les bonnes volontés et surtout la diaspora qui est facteur de co-développement grâce à son transfert matériel et immatériel.
Des solutions durables
Pour diligenter ce problème d’emploi des jeunes, il nous faut :
- Une valorisation du capital humain ;
- Une bonne politique volontariste de développement de l’État sans discrimination ;
- Un enseignement alternatif école — entreprise ;
- Un rééquilibrage territorial avec une répartition des investissements en fonction des potentialités naturelles et humaines disponibles ;
- Une formation de qualité qui peut permettre aux jeunes d’être opérationnels dans le bassin de l’emploi ;
- Une valorisation et un investissement dans l’agriculture moderne du monde rural pour le rendre plus attractif ;
- Procéder à une agriculture écologique ;
- Promouvoir les métiers des nouvelles technologies ;
- Mettre en place des mesures qui facilitent l’accès à l’emploi dans le privé et promouvoir l’auto-emploi des jeunes ;
- Un processus de requalification des travailleurs de l’informel peut-être un atout majeur ;
- Proposer des programmes et politiques de développement conformes avec nos réalités sociales ;
- Un accompagnement des femmes dans la transformation des produits ;
- Un accompagnement technique et financier des porteurs de projets innovants surtout ;
Il me semble aussi très important de procéder à une rationalisation des structures de financement des jeunes plutôt que d’en créer une pléthore. Notre pays dispose d’énormes ressources naturelles et leur mise en valeur efficace peut créer des chaines de valeur dynamiques et génératrices de revenus.
La jeunesse étant le présent et le futur mérite un accompagnement dans les démarches avec une mise en œuvre d’un suivi-évaluation de toutes les stratégies de développement menées. Notre population si jeune est un atout pour atteindre l’émergence tant rêvée si elle est bien formée et mise à l’épreuve. Notre Sénégal dispose d’une démographie qui peut-être une véritable opportunité pour sortir dans les ténèbres de sous-production. La jeunesse qui représente plus de 70 % de la population aurait été plus utile si elle était formée dans l’entrepreneuriat, les stratégies de diversification de l’économie locale, la création d’auto-emploi et l’usage simultané des connaissances scientifiques et holistiques pour aboutir à une production agricole moderne à l’image du Brésil vers les années 1970.
Bocar Harouna DIALLO
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