L’élection de Mahamat Idriss Déby à la présidence du Tchad dès le premier tour, annoncée par l’Agence nationale de gestion des élections (ANGE) le 6 mai 2024, a été reçue avec des réactions mitigées, mais il est impossible d’ignorer le poids symbolique de cette victoire. En obtenant 61,03 % des voix, Mahamat Idriss Déby continue, sans surprise, l’héritage politique instauré par son père, Idriss Déby Itno, marquant une nouvelle page dans la longue histoire de la dynastie Déby au pouvoir.
Depuis la mort de son père en avril 2021, Mahamat, qui avait alors pris les rênes du pays en tant que président de transition, a utilisé ce temps pour solidifier sa base de pouvoir. À travers diverses stratégies, y compris l’intégration d’ex-rebelles dans le dialogue national inclusif et souverain (DNIS) et la formation d’une coalition de plus de 200 partis autour du Mouvement Patriotique du Salut (MPS), le parti de son père, il a préparé le terrain pour une transition sans heurts du pouvoir militaire à un mandat présidentiel officiel.
Soutien de la communauté internationale
L’annonce des résultats provisoires a été faite dans un climat de tension palpable et une rapidité qui a laissé peu de place aux contestations. Cela a non seulement suscité des doutes quant à la crédibilité du scrutin, mais a également jeté une ombre sur l’indépendance de l’ANGE, perçue par certains comme un instrument au service de la continuité de la gouvernance Déby. Le porte-parole de la plateforme de la société civile tchadienne Wakit Tama, Soumaïne Adoum, a exprimé, sur les antennes d’un média occidental, son incrédulité face à la célérité du dépouillement, qui ne semblait pas refléter l’esprit ni l’ambiance de la campagne électorale.
Cette victoire de Déby, loin d’être simplement politique, est aussi un symbole puissant de la permanence de la famille Déby à la tête du Tchad. Elle illustre parfaitement la notion de « dynastie politique » où le pouvoir se transmet non seulement par des élections, mais aussi par des liens familiaux et des réseaux d’influence qui préexistent et outrepassent les processus démocratiques normaux.
La réaction internationale à cette élection a été relativement mesurée. La communauté internationale, qui avait déjà largement soutenu la transition sous Mahamat Idriss Déby pour des raisons de stabilité régionale, semble prête à continuer sur cette lancée. Toutefois, cette acceptation tacite ne fait que renforcer l’impunité avec laquelle la dynastie Déby manœuvre, souvent au détriment d’une véritable démocratisation et du respect des droits civiques de l’opposition et des citoyens tchadiens.
Un chapitre de plus dans l’histoire prolongée de la dynastie Déby ?
Ces élections et leur déroulement soulignent une réalité incontournable : au Tchad, la politique est avant tout une affaire de famille et de réseaux. Le président Mahamat Idriss Déby, en héritant du pouvoir de son père, hérite également des défis de gouvernance et des critiques qui ont entaché les décennies de règne de son prédécesseur. Avec cette victoire, le défi pour lui sera non seulement de maintenir le contrôle, mais aussi de prouver qu’il peut transformer cette dynastie en un leadership qui répond véritablement aux besoins de tous les Tchadiens.
Cette élection n’est pas juste la victoire d’un homme, mais la continuation d’une saga politique qui semble loin de connaître son dénouement. Les Tchadiens, ainsi que les observateurs internationaux, resteront vigilants face aux développements futurs qui détermineront si cette « nouvelle » présidence apportera un changement réel ou sera simplement un chapitre de plus dans l’histoire prolongée de la dynastie Déby.
Chiencoro Diarra
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