Le lundi 5 aout 2024, une atmosphère lourde pesait sur le marché de Kalaban-Coro, alors que des porteurs d’uniforme quadrillaient les lieux en vue d’un nouveau déguerpissement, après celui effectué il y a une dizaine d’années. Ce marché, vibrant cœur économique de la communauté depuis plus d’une décennie, était sur le point de vivre un bouleversement majeur.
Comme un ancien navire quittant son port d’attache après des années de loyaux services, le marché de Kalaban -coro se détache lentement de ses amarres, emportant avec lui les espoirs et les souvenirs de ses commerçants vers un horizon incertain, mais prometteur.
Depuis les premières lueurs du jour, les commerçants, encore sous le choc de cette décision, ont commencé à démonter leurs étals. Les marchandises, soigneusement emballées, étaient chargées dans des camionnettes, des charrettes, des moto-trcycles et divers autres moyens de transport pour être acheminées vers le nouveau marché, récemment rénové par les autorités locales. Un calme apparent régnait, mais il ne suffisait pas à masquer l’inquiétude et la tristesse qui se lisaient sur les visages des commerçants.
Des visages marqués par la tristesse et l’incertitude
Kadidia Fofana, une commerçante de longue date, ne pouvait retenir ses larmes. « Je vends mes produits ici depuis des années, et soudain, on nous demande de partir. Où vais-je bien pouvoir trouver un nouvel endroit pour poursuivre mon commerce ? » se lamentait-elle, les yeux rougis par l’émotion. Cette question, Kadidia n’était pas la seule à se la poser.
Yendi Kané, vendeuse de fruits et de légumes, partageait le même sentiment d’incertitude. « Nous avons consacré toute notre vie à ce marché, c’est notre moyen de subsistance. Où allons-nous maintenant ? »s’interrogeait-elle, tout en chargeant ses paniers de fruits dans une charrette. Le nouveau marché, bien que promettant des infrastructures modernes, suscitait des doutes quant à sa capacité à attirer une clientèle suffisante pour maintenir les affaires à flot.
Les habitants du quartier, eux aussi, exprimaient leur mécontentement. « Le marché de Kalaban-Coro était un véritable lieu de vie, où l’on pouvait trouver de tout. Maintenant, qu’est-ce qu’il va devenir ? » s’inquiétait un riverain, les bras croisés, observant le déménagement forcé.
Un déguerpissement justifié par des raisons de sécurité et d’urbanisme
Malgré les protestations et les questions en suspens, les autorités locales ont maintenu leur décision, arguant que ce déguerpissement était nécessaire pour des raisons de sécurité et d’urbanisme. Les rues étroites et les installations vétustes du marché de Kalaban -coro représentaient, selon elles, un risque pour la sécurité publique.
Après plusieurs tentatives infructueuses de joindre le Secrétaire général de la Mairie, nous nous sommes tournés vers un agent de ladite mairie, qui a préféré garder l’anonymat, et auprès duquel nous avons réussi à recueillir des informations. Selon lui, des solutions de relogement ont été proposées aux commerçants déguerpis. « Nous avons installé des points d’eau, des toilettes et élargi les rues pour améliorer la circulation et garantir un environnement de travail plus sûr et hygiénique. », a-t-il expliqué. Néanmoins, beaucoup de commerçants restent sceptiques quant à la capacité des autorités à les accompagner efficacement dans cette transition.
Un nouveau départ, un nouveau défi
Cette opération de transfert marque une étape importante dans la réorganisation des marchés de la ville de Bamako et de ses environs. Elle symbolise une volonté des autorités de moderniser les infrastructures et de garantir un cadre plus sécurisé pour les activités commerciales. Cependant, la réussite de cette initiative dépendra en grande partie de la capacité des commerçants à s’adapter à leur nouvel environnement.
La transition vers le nouveau marché ne sera pas sans défis. Les commerçants devront reconstruire leurs réseaux de clients et s’habituer à un nouveau cadre de travail. Certains, comme Kadidia et Yendi, craignent que la localisation moins centrale du nouveau marché n’affecte leur chiffre d’affaires.
Pour l’instant, la priorité des commerçants est de s’installer et de reprendre leurs activités le plus rapidement possible.
Bakary Fomba
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