Le Grand homme État se trouve face au Peuple devant le Tribunal universel. A l’ordre du jour : les inondations. Eh, oui, le peuple se dit abandonné à son sort.
Je suis inondé de la tête au pied. En effet, je suis installé sur la rive d’un marigot qui déborde sur ma loge à chaque pluie diluvienne. Aller au travail et revenir à la maison est devenue pour moi un exercice déprimant. Nos voies publiques, sur lesquelles je ne cesse de brûler des ordures de tout genre pour montrer mon mécontentement face à des situations particulières, se trouvent dans un état piteux. Elles sont devenues des mers. Un piroguier est plus tranquille dessus qu’un conducteur de véhicule ou de moto. Ah, oui, j’oubliais également, les conduits d’eaux au bord de ces voies publiques, M. le juge, je les ai transformés en dépotoir d’ordure bouchant ainsi le passage des eaux qui finissent par trouver refuge dans ma chambre.
M. le Juge, pour cet état lamentable dans lequel je me trouve, j’accuse le Grand homme. C’est lui qui doit veiller sur moi en curant les caniveaux, en prenant soin des voies publiques, en évitant que les eaux des mares débordent sur moi.
Le juge failli se retrouver nez contre la terre après cette harangue de victimisation. L’accusé prenant la parole se contente de dire : on m’accuse d’un fait dont la responsabilité est partagée. Car, comme on le dit couramment, « Lorsqu’un seul homme laboure et qu’une multitude d’individus se trouve derrière lui pour détruire tout ce qu’il a accompli, il risque de ne jamais finir son travail. » Après ce discours liminaire, le juge déclare la séance suspendue.
À travers cette mise en scène fictive d’un jugement, nous pouvons nous faire une idée de cette problématique récurrente des inondations au Mali. L’état central est le plus souvent accusé, interpellé pour des inondations de famille, de magasins au bord des voies publiques, voire pour la dégradation de ces axes. Mais rarement les citoyens se demandent ce qu’ils peuvent faire en tant que citoyens. Pourtant, pourtant, dans la plupart des cas, il s’agit des situations dont la responsabilité est du côté du peuple. Mais quand l’éducation vient à manquer à un peuple, ces genres de procès deviennent monnaie courante. Comme pour dire, « avant de demander ce que l’Amérique a fait pour vous, demandez-vous, ce que vous avez fait pour l’Amérique ».
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