Home A la Une Accords de 1968 : la France veut rompre, l’Algérie promet des représailles

Accords de 1968 : la France veut rompre, l’Algérie promet des représailles

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Les tensions entre la France et l’Algérie s’intensifient autour des accords migratoires, des restrictions diplomatiques et des enjeux politiques, dans un climat où surenchères et répliques diplomatiques compliquent toute issue apaisée.

Le thermomètre des relations franco-algériennes est au rouge. Migrants, diplomatie, mémoire coloniale. Les sujets de friction s’accumulent, au point de faire craindre un durcissement durable entre Paris et Alger. D’un côté, une France empêtrée dans ses querelles internes, où l’extrême droite pousse à la surenchère migratoire. De l’autre, une Algérie qui, forte de son rôle stratégique en Afrique et sur le marché de l’énergie, refuse d’être traitée comme un simple partenaire subalterne.

Accords de 1968, la menace française

Le point de crispation du moment ? Les accords bilatéraux de 1968, ces textes qui offrent aux Algériens un statut migratoire privilégié en France. Un vestige des liens post-coloniaux, que François Bayrou, le Premier ministre français, menace aujourd’hui de revoir. Officiellement, Paris accuse Alger de ne pas coopérer sur l’expulsion des clandestins, notamment après l’attaque de Mulhouse, perpétrée par un Algérien en situation irrégulière.

Mais la manœuvre a une autre lecture. En pleine montée des tensions identitaires en France, le gouvernement cherche un bouc émissaire et trouve, comme souvent, l’Algérie. L’extrême droite applaudit, la diplomatie algérienne s’indigne.

Réplique immédiate d’Alger. Les restrictions françaises visant les passeports diplomatiques algériens sont une « atteinte aux intérêts nationaux ». Si Paris persiste, Alger menace de mesures réciproques. Ce qui ouvre la voie à un bras de fer dont nul ne peut prédire l’issue.

L’ombre de l’extrême droite sur les relations franco-algériennes

Mais au-delà du choc des chancelleries, cette crise révèle une dynamique plus profonde. La place de l’Algérie dans le débat politique français. Depuis des années, le spectre de l’immigration algérienne sert d’épouvantail aux droites françaises, et le RN de Jordan Bardella en fait un argument électoral permanent.

L’Algérie, de son côté, ne voit plus la France comme un partenaire incontournable. Son influence grandit en Afrique, sa coopération avec la Russie se renforce, et ses hydrocarbures restent une arme diplomatique puissante. Le temps où Alger encaissait les coups sans broncher est révolu.

Les conséquences d’une rupture prolongée

Le refroidissement des relations pourrait peser lourd sur plusieurs secteurs-clés, mettant à mal des intérêts stratégiques des deux côtés de la Méditerranée.

L’Algérie, principal fournisseur de gaz de la France après la Norvège, dispose d’un levier de pression majeur. Une réduction des exportations vers Paris serait un coup dur pour l’approvisionnement énergétique français, d’autant plus que l’Europe cherche à diversifier ses sources face à la crise ukrainienne. Avec un marché asiatique de plus en plus demandeur, Alger pourrait privilégier d’autres partenaires. Ce qui compliquerait davantage la transition énergétique européenne.

Sur un tout autre plan. Un durcissement des accords de 1968 freinerait l’accès des Algériens à la France, mais l’impact ne serait pas à sens unique. De nombreuses entreprises françaises opérant en Algérie bénéficient de dispositions avantageuses grâce à ces accords. En cas de restriction, les expatriés français pourraient à leur tour voir leur situation fragilisée. Une situation qui compliquerait les investissements et la présence économique française dans un pays qui reste l’un de ses principaux partenaires commerciaux en Afrique.

Sur le plan sécuritaire, alors que la France perd du terrain en Afrique de l’Ouest, notamment avec le retrait de ses troupes du Mali, du Burkina et du Niger, peut-elle se permettre une rupture avec Alger ? L’Algérie joue un rôle clé dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, en raison de sa position géographique et de son expérience en matière de renseignement. Une détérioration des relations affaiblirait la coopération sécuritaire, à un moment où Paris cherche à redéfinir son influence sur le continent face à l’expansion de la Russie et d’autres acteurs internationaux.

Les tensions actuelles pourraient donc avoir des conséquences bien au-delà des déclarations diplomatiques, affectant des secteurs stratégiques qui lient encore étroitement la France et l’Algérie.

Dans ce bras de fer, ni la France ni l’Algérie n’ont intérêt à une escalade durable. Les liens économiques et historiques sont trop profonds, et les deux pays savent qu’ils devront, tôt ou tard, renouer. Mais tant que les surenchères verbales primeront sur la diplomatie, la tension restera vive.

En attendant, les coups pleuvent. Et l’orage diplomatique continue de gronder.

Chiencoro Diarra 


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