La deuxième session ordinaire du Collège des chefs d’État de l’AES, ouverte à Bamako, ce mardi 23 décembre 2025, marque une nouvelle étape dans la structuration politique du bloc sahélien. Les présidents Assimi Goïta, Ibrahim Traoré et Abdourahamane Tiani ont réaffirmé la souveraineté de leurs États face aux ingérences extérieures, tout en appelant à une intégration accrue pour répondre aux défis de sécurité et de développement.
Sous les acclamations d’une foule compacte rassemblée aux abords du Centre international de Conférences de Bamako (CICB), les trois dirigeants de la Confédération des États du Sahel (AES) ont ouvert, mardi 23 décembre, la deuxième session ordinaire du Collège des Chefs d’État. L’événement, présidé par le général Assimi Goïta, président de la Transition malienne, a rassemblé les délégations du Burkina Faso et du Niger, ainsi qu’un large public venu manifester son soutien à cette alliance née d’une volonté de rupture avec les anciens partenaires occidentaux.
La cérémonie, marquée par une ferveur populaire rare, a débuté sur une note artistique : l’Ensemble instrumental du Mali a interprété Dunabaw (les hôtes de marques), avant la projection d’un court film retraçant les réalisations de la présidence malienne de l’AES. Dans la salle, la présence des chefs de gouvernement, des présidents d’institutions et de l’ancien président malien Dioncounda Traoré soulignait l’importance historique de ce rendez-vous, un an et demi après la création de la Confédération, en juillet 2024, issue de l’Alliance des États du Sahel formée en 2023.
Un discours de résistance et d’unité régionale
Dans une allocution très attendue, le capitaine Ibrahim Traoré, président du Burkina Faso, a livré un discours à forte portée symbolique. Utilisant la métaphore d’un « hiver noir » pour désigner les menaces pesant sur l’Afrique de l’Ouest, il a exhorté les peuples du Sahel à s’unir face aux « manœuvres impérialistes ».
« L’hiver viendra, a-t-il prévenu. Ce sera un hiver froid et sanglant, un hiver imposé à l’Afrique par ceux qui cherchent à la diviser. »
Appelant à la vigilance et à la cohésion, le chef de l’État burkinabè a fustigé les « pseudo-intellectuels » et les « médias manipulateurs » accusés de semer la discorde, tout en saluant la résilience des populations sahéliennes. « Restez sereins, a-t-il conclu. L’AES vaincra, parce que nos peuples ont compris que leur liberté ne viendra que d’eux-mêmes. »
Le Niger réaffirme la souveraineté des peuples du Sahel
Le général Abdourahamane Tiani, président de la République du Niger, a pour sa part replacé la Confédération dans une perspective historique et politique. « Depuis le 18 août 2020 au Mali, le 30 septembre 2022 au Burkina Faso et le 26 juillet 2023 au Niger, nos peuples ont choisi de prendre leur destin en main », a-t-il rappelé. Pour lui, l’AES constitue une réponse directe aux « décennies de prédation et d’assistanat » ayant freiné le développement du Sahel.
« Désormais, les décisions qui concernent nos peuples se prennent à Ouagadougou, à Bamako et à Niamey, et nulle part ailleurs. » Le chef de l’État nigérien a également rendu hommage aux forces de défense et de sécurité engagées dans la lutte contre le terrorisme, saluant leur courage « face à l’adversité des puissances extérieures ». Il a évoqué les premières réalisations de la Confédération : la mise en place d’une Force unifiée, la coordination diplomatique entre les trois capitales et la création d’une banque d’investissement confédérale.
Assimi Goïta : « L’AES est devenue une réalité incontournable »
Clôturant la série d’interventions, le général Assimi Goïta a dressé le bilan de la présidence inaugurale du Mali à la tête de la Confédération. Après une minute de silence en hommage aux victimes civiles et militaires tombées « pour la défense de la patrie », le président malien a salué « la résilience des peuples du Sahel et le soutien constant de la diaspora ».
« Depuis un an, la Confédération AES s’est affirmée comme un acteur crédible sur la scène internationale. Nos partenaires sincères et fiables ont compris le sens de notre combat pour la souveraineté », a-t-il déclaré.
Sur le plan du développement, il souligné l’inauguration de la banque confédérale d’investissement et de développement (BCID-AES) dotée de 500 milliards de francs CFA, annoncé la création d’une centrale d’achat régionale pour les produits de première nécessité, ainsi que le lancement de la télévision AES, destinée à « renforcer la souveraineté informationnelle ». Des projets d’envergure sont également en cours, parmi lesquels une compagnie aérienne, un réseau ferroviaire transsahélien et une autoroute reliant Bamako, Ouagadougou et Niamey.
« Notre espace, souvent qualifié à tort de pauvre, regorge de ressources et de talents. Avec le soutien de nos peuples, unis et solidaires, nous réussirons », a affirmé le président Goïta, ovationné par le public.
Une ferveur populaire sans précédent
À l’extérieur du CICB, la foule rassemblée le long du parcours présidentiel a offert une démonstration d’adhésion sans équivoque aux idéaux de l’AES. Drapeaux, chants patriotiques et pancartes à l’effigie des trois chefs d’État témoignaient d’un soutien massif à la Confédération. Dans les rues de Bamako, les habitants ont salué le cortège présidentiel dans une ambiance de liesse, certains agitant des banderoles proclamant : « Unis, nous vaincrons ! »
Cette mobilisation populaire illustre, selon plusieurs observateurs, la portée symbolique de l’AES : un projet à la fois politique, identitaire et social, porté par des peuples décidés à reconquérir leur souveraineté.
Un an et demi après sa création, la Confédération des États du Sahel cherche désormais à transformer l’élan populaire en structures pérennes. Si les avancées en matière de sécurité et de diplomatie sont saluées, les défis économiques et institutionnels restent nombreux.
Pour le général Goïta, cette deuxième session marque un tournant : « L’AES n’est pas une alliance conjoncturelle, mais une confédération de destin. Elle continuera à grandir et à inspirer les peuples d’Afrique qui refusent la résignation. »
A.D
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