Les campagnes électorales constituent pour les citoyens de Yélémabougou un moment propice pour s’enrichir. Tous les partis politiques viennent leur offrir des dons pour qu’ils votent pour eux. Cette histoire fictive aborde ce phénomène.
Imiza est un citoyen de Yélémabougou d’après qui la période des campagnes électorales est un moment opportun pour se faire des sommes colossales auprès de différents partis politiques. Son ami, Kadran, quant à lui, reste fidèle à lui-même. D’où la cause de toutes les polémiques entre Imiza et son ami. Kadran pense que ce n’est pas à travers la corruption qu’ils feront venir au pouvoir des hommes vertueux, ayant l’amour de la patrie. Mais qu’il faudrait plutôt exiger aux partis politiques d’expliciter leur projet politique.
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Discorde entre les amis
Imiza voit dans ce comportement de Kadran une malédiction. Accepter les présents piégés des hommes politiques constitue pour lui une bénédiction alors que son refus renvoie à une malédiction.
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A chaque fois qu’un homme politique se présente à lui, il lui donne aussitôt son engagement et récupère son présent pour aller lui voter.
Institutionnalisation de la corruption
Ce comportement a fini par s’installer partout à Yélémabougou. Femmes, hommes, jeunes et vieux, tous sont devenus des corrompus. Ce vice a fini par être considéré comme une forme d’institution, de gagne-pain puisque les hommes politiques affluaient considérablement dans l’espoir d’avoir de la popularité auprès de ces citoyens égarés.
Cette situation intervient dans un contexte difficile de l’existence des citoyens de Yélémabougou. Plus rien ne fonctionnait dans cet État. Chacun se cherche. Tout le monde veut avoir quelque chose à mettre entre les dents pour ne pas mourir trop tôt. Mais, comment pouvaient-ils [les citoyens] savoir le danger auquel ils s’exposaient ?
Les citoyens se lient mains et pieds
Les citoyens de Yélémabougou ont fini par être leur propre fossoyeur. Quand les élections présidentielles ont commencées et les campagnes électorales ont été ouvertes, Kalifa, un candidat malhonnête, hypocrite, égocentrique, s’est tourné vers cette population de Yélémabougou. Il leur a tenu plusieurs promesses, leur a donné des vivres, approvisionnant des communautés féminines en matériels : chaises, bâches, marmites, etc. Que de biens éphémères ! La population se sentait dans un paradis terrestre éternel. Elle ne pouvait jamais imaginer qu’elle était en train de se lier pieds et mains et de se livrer tout entier à des carnassiers assoiffés de sang.
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Gouvernance par vengeance
Après les campagnes électorales, tous les citoyens votent pour Kalifa qui devient le président de la République de Yélémabougou. Kalifa va alors gouverner le pays par le sang et la terreur. Il va devenir le Léviathan de Thomas Hobbes, le prince de Machiavel.
Les élections ont porté au pouvoir Kalifa, un souverain sans aucune moralité. Kalifa, puisqu’il a gagné les élections grâce à l’achat de conscience, commence son règne par soutirer toute la somme qu’il a investie dans ses campagnes.
À cet effet, tous les moyens qui lui tombaient sous la main étaient jugés efficaces : corruption, vol, surfacturation, règne de la famille, l’individualisme, favoritisme, etc.
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Kalifa remplaçant ainsi Onar à la tête du pays va aggraver l’insécurité sur tous les plans. Les familles endeuillées deviennent nombreuses. Le trafic des êtres humains se multiplie. Les enfants ne sont plus en sécurité. Les assassinats à titre de sacrifices rituels se multiplient. Une pratique devenue très fréquente dans ce pays à chaque fois qu’il s’agit d’élection.
Un monde de sangsues
Le capitalisme a atteint le summum. La déshumanisation s’impose des suites d’un irrationalisme sauvage. La dignité humaine est bafouée. L’homme devient un objet de commerce. Une inversion s’installe. L’objet des sacrifices est désormais l’humain qui est sacrifié sur les autels personnels et collectifs pour l’atteinte d’objectifs égoïstes. La raison manquant à l’homme, il ne se donne plus le temps de se demander si le sacrifice de son prochain peut réellement permettre la résolution de ses problèmes. Ce monde nous inquiète.
Ces problèmes sont devenus plus graves lors des élections où l’on a l’impression que ce sont des sangsues qui sont en concurrence pour le pouvoir.
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Plus aucun jour ne se passe sans que nous apprenions que des hommes se sont entre-tués dans la poursuite de tel ou tel but. Des guerres se multiplient. Des scènes de braquage au cours desquels des hommes sans foi tuent leurs semblables pour leurs biens.
Yélémabougou devient de plus en plus macabre. L’hécatombe règne partout. L’homme perd de plus en plus son humanité. La concurrence est rude entre les sangsues. Les pauvres sont ceux qui amassent les conséquences désastreuses. Le règne de Kalifa devient ainsi pire que celui d’Onar.
L’État de nature que décrit Rousseau vaut mieux que l’État de Yélémabougou. Dans cet état de nature rousseauiste au moins la pitié animait les hommes et faisait le lien entre eux. Chacun portait secours à ses semblables en danger. L’entre-aide était ce qui rendait cette vie plus belle. Qu’en est-il à Yélémabougou ?
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Un État barbare
Le barbarisme est devenu la caractéristique fondamentale de cet État. L’humain se nourrit de la chair de son semblable. Si jadis les animaux étaient l’objet des sacrifices, à Yélémabougou, l’humain se substitue aux animaux. L’humain est plus sollicité dans les différents rituels des hommes en quête de popularité.
Plus de pitié, plus de dignité. Pour l’argent, les bouchers de la chair humaine affûtent chaque jour leurs armes. Les pièces humaines sont étalées sur les stands des marchés. Elles sont vendues aux mêmes titres que les objets. Comme victimes : les mineurs, les fillettes, les albinos, etc. Leur tête, leur sexe, leur nombril constituent les parties les plus convoitées par les commerçants ensanglantés qui ne croient pas sûrement à l’existence d’un monde invisible a posteriori d’un jugement dernier.
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Entre Imiza et Kadran, qui aura raison dans cette divergence de vues ? Comment le règne de Kalifa va se terminer ? Les réponses dans la suite de cette histoire, le dimanche prochain.
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