L’amitié entre un homme et une femme est restée longtemps inconcevable dans nos sociétés, remplies de préjugés. La généralisation du travail des femmes puis la mixité à l’école ont vite favorisé ce genre de relation. Les périodes de célibat, plus longues de nos jours, laissent le champ libre à la naissance d’amitié solide entre hommes et femmes, et à toutes leurs ambigüités.
Il y’a encore quelques décennies, l’amitié entre un homme et une femme était considérée comme impossible ou illusoire. On la considérait comme une forme d’attirance sexuelle ou amoureuse masquée. De nos jours, elle semble pouvoir favoriser la compréhension du sexe opposé et de ses codes.
« Aucun de nous n’a ressenti d’attirance l’un pour l’autre »
Ce genre de relation n’est ni fondée sur l’intérêt social ou économique ni sur la parenté ou l’attirance sexuelle. Mais plutôt sur l’acceptation réciproque, le souhait de fréquentation, l’intimité, la confiance, le soutien psychologique, voire matériel, l’interdépendance affective et la durée, sont autant d’éléments qui composent cette amitié. Une fois que l’un venait à manquer, la relation peut facilement être compromise.
La génération actuelle a vécu la mixité comme une évidence. Outre cela, les garçons et les filles ont bénéficié de la même considération, dans le respect de leur part féminine et masculine. Depuis tout petits, ils se comprennent et sont proches émotionnellement. Il n’est pas rare de voir que la meilleure amie d’une fille soit un garçon.
La complicité amicale ne laisse pas assez de place à l’altérité pour que le désir survienne. Un ami, c’est quelqu’un qui nous connaît par cœur, à qui nous nous livrons sans fard, argumente Mariam Dembélé, étudiante âgée de 22 ans à la Faculté des Sciences économiques et de gestion (FSEG). Depuis 9 ans, elle tient une relation d’amitié avec un homme, qu’il a rencontré alors qu’il avait 13 ans.
« Je n’ai pas beaucoup d’amies filles, car la plupart de ces relations sont toxiques et contiennent beaucoup de jalousie. Ce qui est totalement le contraire avec les hommes », explique la jeune étudiante tout en soulignant qu’un « meilleur ami, c’est surtout celui qui nous écoute. Tout ce qu’une femme veut c’est qu’un homme l’écoute, lui donne de l’affection, et d’attention ». Selon Mariam, son meilleur ami est la personne qui le connaît le mieux au monde.
Quant à savoir si ce genre de relation est possible sans désir sexuel l’un pour l’autre, Mariam répond : « À aucun moment, aucun de nous n’a ressenti d’attirance l’un pour l’autre. Il me protège comme un frère et moi comme une sœur. Dans ma vie, je pense que c’est ma meilleure relation ». Une relation que la jeune étudiante ne souhaiterait briser pour rien au monde.
Moussa Konaté, commençant de vêtements pour homme et femme au grand marché de Bamako, connait également ce genre de relation. Sa meilleure amie est d’ailleurs un de ses soutiens inconditionnels. « Elle m’a toujours soutenue et est toujours restée à mes côtés. À un moment donné j’avais de sérieux problèmes d’argent et aucun de mes amis ne m’a soutenu, mais cette dernière a été capable de prendre son propre argent pour me soutenir », témoigne M. Konaté.
Bien que les deux se soient mariés aujourd’hui, ils poursuivent leur relation d’amitié et se font confiance.
Une relation toujours ambiguë
Si pour certains la véritable amitié avec le sexe opposé est bénéfique et désintéressée, pour d’autres elle n’existe point. Car l’un finira toujours par avouer ses sentiments cachés. Tel est le cas de Binta Cissé, tiktokeuse malienne : « Au début, je pensais que l’amitié homme-femme pouvait fonctionner, mais j’avais tort », a-t-elle avoué tout en confiant : « J’avais un meilleur ami. On était toujours ensemble. On s’appelait même moitié. Je ne sais pas quelle mouche l’a piqué. Un jour, il m’envoie un message pour avouer qu’il avait quelque chose à me dire ».
Celui que la jeune tiktokeuse avait toujours considéré comme son meilleur ami finit par lui révéler ses sentiments amoureux. Il lui explique clairement qu’il ne « supporte plus que je lui parle de mes copains, car il est jaloux et veut être mon petit copain ». Malheureusement, Binta ne ressentait pas la même chose pour lui. La meilleure amitié venait ainsi de se terminer. Pour la jeune étudiante, dans ce genre de relation, il existe toujours une ambiguïté.
Mohamed Fomba, pharmacien, a également vécu un cas similaire. « Ma petite copine me disait toujours que celle que je considérais comme ma meilleure amie est amoureuse de moi », raconte M. Fomba qui prenait ces avertissements comme de la jalousie mal placée, malgré que la jeune dame se mettait toujours entre lui et sa petite-copine. Sa meilleure amie finit par rompre sa relation avec sa copine en confiant à cette dernière qu’elle sortait avec son copain « tout en lui montrant une photo sur laquelle on me voyait lui faire une bis sur la joue ».
Une fois que la copine de M. Fomba a pris ses distances, la jeune dame a avoué qu’elle « ressentait quelque chose pour moi depuis longtemps ». Face au refus de son ami de changer la nature de leur relation, la jeune fille avoue son forfait en indiquant avoir été responsable de la séparation de M. Fomba avec sa copine.
Le résultat de certaines recherches prouve que dans la majorité des relations d’amitié entre un homme et une femme, il y’a toujours un minimum d’attirance entre les deux. La plupart d’entre eux évitent de la signaler, considérant que la déclaration compromettrait sérieusement la belle amitié née entre eux.
Hawa Diaby
Article à lire également dans la parution d’aujourd’hui de l’hebdomadaire Sahel Kunafoni.
En savoir plus sur Sahel Tribune
Subscribe to get the latest posts sent to your email.